qui a raison ? Hobbes, Malraux ? (egoisme éternel?) - Société - Discussions
Marsh Posté le 10-10-2003 à 18:42:04
Généralement, Atman, j'ai remarqué qu'on aime bien parler ensemble, mais que tu n'es pas d'accord avec ce que je dis.
Alors, je pense que les exemples que tu rapproches sont intéressants, en ce qu'ils montrent l'égoïsme brutal, la coercition de ces passions et le dévouement héroïque.
Toutefois, je te dirai que la grandeur du geste du héros, qui donne son cyanure aux jeunes, est une manière de sublimation de soi, dans le sacrifice. C'est si l'on veut l'affirmation magnifique de l'égoïsme, dans une situation de toute façon desespérée.
De même, à la fin du film de Kubrick, Spartacus tue son ami, afin que ce soit lui qui finisse crucifié et que l'autre meurt rapidement.
La cruauté est partout, mais dans le cas cité par Hobbes, elle sert à la rapine, au vol. Dans le cas de Malraux, elle sert au sacrifice de soi-même, qui est en même temps l'affirmation de soi face à la mort.
Marsh Posté le 10-10-2003 à 18:44:50
HotShot a écrit : Ouaip, l'un n'empêche pas l'autre. Tu peux massacrer tes voisins et te saigner aux quatre veines pour tes gosses (ou l'inverse, encore que...) |
Je ne sais pas si les deux sont possibles dans le même homme !
Je dis que chez le voleur comme chez Mère Théresa, c'est en qqe sorte le même instinct à l'oeuvre, mais de manière très différente.
Marsh Posté le 11-10-2003 à 08:50:16
Rahsaan a écrit : Généralement, Atman, j'ai remarqué qu'on aime bien parler ensemble, mais que tu n'es pas d'accord avec ce que je dis. |
Oui j'ai plaisir a converser avec toi
On est pas toujours d'accord mais ça a l'avantage de faire avancer la discussion.
Pour le 1/ tu penses que le geste de Katow est encore de l'égoisme ?
Pour le 2/ tu penses que pour etre capable d'un tel sacrifice au profil des autres, il faut avoir beaucoup de cruauté en soi a la base, cruauté qui a été sublimé ?
Tu vois ce sacrifice comme une affirmation de soi ? (donc pur egoisme)? La je ne suis pas d'accord (encore une fois ):
je vois ça comme une manifestation de l'empathie (contraire de l'égoisme) ou pour parler le langage psycho-Bouddhique , une manifestation du soi au détriment du moi .
Marsh Posté le 11-10-2003 à 08:53:22
HotShot a écrit : Ouaip, l'un n'empêche pas l'autre. Tu peux massacrer tes voisins et te saigner aux quatre veines pour tes gosses (ou l'inverse, encore que...) |
Oui , un bon pere de famille comme on dit.
Mais aimer ses enfants c'est facile , voir parfois cela relève d'un certain narcissisme, cela n'empeche pas l'egoisme.
Avoir de la compassion pour des inconnus c'est plus dur, surtout si cette compassion/pitié/sacrifice se fait au détriment (dans le cas de Katow c'est peu dire!) de sa propre personne.
Marsh Posté le 11-10-2003 à 09:57:51
Atman a écrit : |
Rendons à Plaute (mort en 184 avant JC) ce qui est à Plaute: "Homo Homini Lupus" c'est lui le premier à en avoir écrit cette formule, dans le texte Asinaria.
Thomas Hobbes a repris la formule, en effet, dans son ouvrage De cive, Epistola dedicatoria.
A+,
Marsh Posté le 11-10-2003 à 10:10:43
pour moi tout est relatif à la morale, la morale de kant plus particulièrement. "assurer son propre bonheur est un devoir, car le fait de ne pas être content de son état pourrait devenir une tentation d'enfreindre ses devoirs" Kant Fondements de la métaphysique des moeurs.
"agis toujours de telle sorte que tu puisses ériger la maxime de ton action en loi universelle... Agis toujours de telle sorte que tu traites l'humanité dans ta personne aussi bien que la personne d'autrui, comme une fin et jamais comme un moyen". Kant Critique de la raison pratique.
Marsh Posté le 11-10-2003 à 10:42:05
> Nogood : mais pour le cas du sacrifice héroïque, à ton avis, est-ce que cela est conforme à Kant ? Quelle serait la maxime de cette action ? Est-elle universalisable ?
Atman a écrit : |
De la cruauté sublimée, je dirais oui. Que cela soit de l'affirmation de soi, et à un haut degré, oui également, car il s'affirme comme un héros. Il y a de l'orgueil dans ce geste. Il est certain qu'il a ressenti également de l'empathie pour les deux jeunes chinois qu'il sauve. Plus exactement, il a ressenti en lui ce que ce pouvait être que la peur. La peur des deux jeunes a suscité en lui la peur (empathie) et il a surmonté cette tentation en se montrant plus fort que les deux chinois. Dans son optique, sa mort est noble, et il ressent une pitié supérieure pour les deux qui mourront rapidement, grâce à lui.
Marsh Posté le 11-10-2003 à 11:15:37
à propos de l'héroïsme j'ai trouvé ça :
"L'action par laquelle un homme cherche à justifier sur le champ de bataille sa réputation de bravoure, et dans laquelle il finit par laisser sa vie, est rapportée sans doute d'un côté au devoir et, d'un autre côté, considérée essentiellement comme méritoire, mais notre estime pour cette action est considérablement diminuée par le concept de l?amour de soi, qui semble ici être le premier mobile. Plus décisif est le sacrifice magnanime de sa vie au salut de la patrie : nous donnons alors tout notre respect à celui qui cherche à l'accomplir en sacrifiant tout ce qui peut avoir quelque valeur pour nos penchants les plus intimes ; nous trouvons notre âme fortifiée et élevée par un tel exemple, puisque nous pouvons être convaincus par là que la nature humaine est capable de s'élever, à une si grande hauteur, au-dessus de tous les mobiles que peut lui opposer la nature" Kant
Marsh Posté le 11-10-2003 à 11:26:29
Nogood a écrit : à propos de l'héroïsme j'ai trouvé ça : |
Je crois pas que dans le feu de la bataille un mec se dit "tiens si j'allais courrir sous le feu ennemi pour me faire valoir devant mon capitaine" ...
A la guerre y a deux type d'homme, les pauvres gars et les tetes brulée
Mais dans les deux cas , les gars sont egaux devant la mort quand ils sont sous le feu des balles , et crois moi , tu penses a autre chose que de vouloir faire le cakos ... et les actions dites heroiques sont surtout des actions non reflechie fait sous le coup du moment et qui au final marchent ...
Marsh Posté le 11-10-2003 à 11:50:33
Khan a écrit : |
je ne crois pas que d'agir de façon magnanime pour sa patrie puisse se traduire par faire le "cakos".
Citation : tiens si j'allais courrir sous le feu ennemi pour me faire valoir devant mon capitaine |
parles en aux millions militaires morts qui l'ont fait pour leurs patrie.
Une citation n'est pas présentée pour contextualiser un problème mais plutôt pour étayer une idée.
Marsh Posté le 11-10-2003 à 11:53:41
N'y a t-il pas aussi de l'amour de soi dans le sacrifice pour la patrie ? N'est-ce pas une manière de s'aimer soi-même comme citoyen d'une patrie -et dire que l'on aime ainsi sa patrie ?
Marsh Posté le 11-10-2003 à 12:05:10
"la morale commence où commence l'attachement à un groupe" Durkheim
Marsh Posté le 11-10-2003 à 12:15:15
Nogood a écrit : pour moi tout est relatif à la morale, la morale de kant plus particulièrement. "assurer son propre bonheur est un devoir, car le fait de ne pas être content de son état pourrait devenir une tentation d'enfreindre ses devoirs" Kant Fondements de la métaphysique des moeurs. |
Interessant!
Mais comme le dit Gilou, il faut rendre au tao ce qui est au tao :
Les taoistes (religion de la chine 2 siecles avant JC) pensent que faire son bonheur personnel , c'est aussi faire le bonheur d'autrui et plus encore , c'est bénéfique pour l'univers tout entier.
edit: j'ai oublié un truc, les taoistes cherchent(cherchaient)
a atteindre l'immortalité (pas par egoisme mais pour les raisons citées plus haut) d'ou tout un tas de pratiques esotéristes et alchimiques.
Marsh Posté le 11-10-2003 à 13:11:32
Rahsaan a écrit : > Nogood : mais pour le cas du sacrifice héroïque, à ton avis, est-ce que cela est conforme à Kant ? Quelle serait la maxime de cette action ? Est-elle universalisable ? |
Pour la cruauté sublimée , c'est possible (quoique je remplacerais plutot cruauté par violence )
Pour l'orgueil, je ne suis pas d'accord . Il ne s'agit pas ici de jouer le héros pour la patrie, mais d'accepter de mourrir dans d'horribles souffrances et de façon anonyme (point de gloire posthume)(c'est la le point fondamental) a la place d'un autre plus faible.
C'est un acte d'empathie, l'autre est considéré comme un autre soi-meme mais plus faible.
Marsh Posté le 11-10-2003 à 15:03:07
> Atman : oui je suis d'accord. Mais par ailleurs, ce n'est qu'un héros de fiction. Or, en lui donnant cette mort, Malraux prétend en faire un exemple. Il a donc une postérité, une valeur d'exemple. Il y a là une dualité ambigüe propre à la littérature. Dès lors que cette mort est racontée, elle acquiert sa gloire.
Marsh Posté le 11-10-2003 à 15:39:44
Rahsaan a écrit : > Atman : oui je suis d'accord. Mais par ailleurs, ce n'est qu'un héros de fiction. Or, en lui donnant cette mort, Malraux prétend en faire un exemple. Il a donc une postérité, une valeur d'exemple. Il y a là une dualité ambigüe propre à la littérature. Dès lors que cette mort est racontée, elle acquiert sa gloire. |
C'est pour cela que je demande qui a raison entre Malraux et Hobbes. 2 visions de l'homme, j'aurais pu faire un sondage.
Marsh Posté le 10-10-2003 à 18:13:19
Pour Hobbes, « l?homme est un loup pour l?homme » et :
(citation)
« Si deux hommes désirent la même chose alors qu?il n?est pas possible qu?ils en jouissent tous les deux, ils deviennent ennemis : et dans la poursuite de cette fin( qui est, principalement, leur propre conservation, mais parfois seulement leur agrément), chacun s?efforce de détruire ou de dominer l?autre. Et de la vient que, la ou l?agresseur n?a rien de plus a craindre que la puissance individuelle d?un autre homme, on peut s?attendre avec vraisemblance, si quelqu?un plante, sème, bâtit, ou occupe un emplacement commode, a ce que d?autres arrivent tout équipés, ayant unis leurs forces pour le déposséder et lui enlever non seulement le fruit de son travail mais aussi la vie et la liberté. Et l?agresseur a son tour court le même risque à l?égard d?un nouvel agresseur »
A.Schopenhauer va dans ce sens quand il affirme : « L?Etat n?est qu?une muselière mise aux bètes féroces que sont les hommes et dont le role n?est pas de les rendre meilleurs, mais de les empécher de se nuire ."
Toutefois, A. Malraux dans son roman « la condition humaine » croit aux héros capables des plus grands sacrifices :
Kyo opposant à Tchang Kaï-chek est jeté dans une prison répugnante. Il comparait devant König, le chef de police qui a refusé sa libération. Ce dernier veut absolument faire perdre à Kyo sa dignité : où il trahit les siens, où il sera livré à la torture . Kyo refuse de collaborer et rejoint sous le préau, ses camarades communistes qui attendent d?être brûlés vifs dans la chaudière d?une locomotive. Kyo retrouve Katow. Kyo évite le supplice en se suicidant avec le cyanure qu?il dissimulait sur lui. Katow, lui , donne son cyanure à deux jeunes chinois complètement terrorisés par le sort qui les attend et marche, plein de dignité, vers le supplice . (...un ange passe)