A quoi sert la philo...

A quoi sert la philo... - Sciences - Discussions

Marsh Posté le 09-06-2005 à 22:21:10    

Je sais c'est bizare comme question, mais c'est une vraie question qu'on m'a posée et j'ai pas été très convainquant. Qui pourrait vraiment me répondre?? plz :hello:

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Marsh Posté le 09-06-2005 à 22:21:10   

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Marsh Posté le 09-06-2005 à 22:24:56    

a expliquer la vie (un peu comme la science d'ailleurs)

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Marsh Posté le 09-06-2005 à 22:26:50    

Etant donné que la conscience est le propre de l'être humain...

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Marsh Posté le 09-06-2005 à 22:36:01    

oh ! pour une fois que je sors une phrase à peu près intelligente [:am72]
 :D

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Marsh Posté le 09-06-2005 à 22:38:03    

la philo je detestais, j'ai eu 4/20 au bac, j'etais vraiment nul, une vraie buse
maintenant etant à la fac je regrette vraiment, je sent que je suis passé à coté d'une matiere vraiment intéressante
donc la philo c'est une matiere indispensable

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Marsh Posté le 09-06-2005 à 22:38:45    

ze_geek a écrit :

Je sais c'est bizare comme question, mais c'est une vraie question qu'on m'a posée et j'ai pas été très convainquant. Qui pourrait vraiment me répondre?? plz :hello:


 
A RIEN! C'est de la merde en barre! C'est de la masturbation intellectuelle stérile! Une perte de temps et d'argent pour l'éducation nationale!  :fou:   :fou:   :kaola:   :bounce:   :fou:  
 
Ahhh! Ca fait du bien! J'ai jamais pu pondre un devoir de philo, j'ai toujours été bloqué à la première ligne, j'avais l'impression de devoir écopé une baignoire avec une passoire. Au bac, j'ai sauvé les meubles en faisant un devoir de français, d'où un respectable 7/20 ....  :whistle:  
 
Sérieusement, je ne vois pas l'intérêt de la discipline. Je ne vois pas quel est l'apport qu'elle a pu avoir pour l'humanité.
 

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Marsh Posté le 09-06-2005 à 22:40:55    

andhar a écrit :


Sérieusement, je ne vois pas l'intérêt de la discipline. Je ne vois pas quel est l'apport qu'elle a pu avoir pour l'humanité.


 
la philo c'est de la reflexion, si tu ne vois pas en quoi ca a pu faire progresser l'humanite bah heu dommage :whistle:

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Marsh Posté le 09-06-2005 à 22:42:35    

ca sert a s'ouvrir l'esprit sur différentes questions plus ou moins sympa. Apres l'intéret que tu y trouveras dependra de ton prof. Moi je sais que j'ai eu un prof cette année, on a pas suivi le programme, on a quasiement que fait des débats sur l'actu (homoparentalité, avortement...).
Et surtout ca te montre d'autres manieres de penser que tu ne soupsonnais meme pas.


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Toinou87 ;-p May the force be with you!!
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Marsh Posté le 09-06-2005 à 22:45:32    

Zizig, où es-tu quand on a besoin de toi? [:drwatson]


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Tees et autres trucs pour geeks | Mon Instagram il est bien. Suis-le.
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Marsh Posté le 09-06-2005 à 23:01:03    

polatouche a écrit :

la philo c'est de la reflexion, si tu ne vois pas en quoi ca a pu faire progresser l'humanite bah heu dommage :whistle:


 
Je pense que l'on peut trés bien réfléchir sans faire de la philo. Attention, j'ai pas dit que les philosophes étaient des abrutis, ce sont au contraire des gens brillants.
 
Maintenant, donne moi un exemple où la philo a fait progresser l'humanité. La philo, pas les philosophes.

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Marsh Posté le 09-06-2005 à 23:01:03   

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Marsh Posté le 09-06-2005 à 23:14:38    

Je viens de jeter un coup d'oeil sur les sujets du bac de cette année. Par exemple, j'aime bien le sujet "Etre libre, est-ce ne rencontrer aucun obstacle ?".
 
C'est typiquement le genre de questions qui pourrait amener les petits rebelles de pacotille à douter de l'idée que la liberté, c'est pas seulement tagger "nik la police" sur les murs, ou dire fièrement à tout bout de champ "j'en ai rien à foutre"
 
Je ne sais pas là tout de suite quel est l'impact de la philo sur le destin de l'humanité, mais je sais que c'est une occasion de douter et d'en tirer partie.


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La ligne droite n'est en aucun cas le plus court chemin entre deux points. Sauf, bien sûr, si les deux points sont bien alignés l'un en face de l'autre
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Marsh Posté le 10-06-2005 à 08:26:20    

andhar a écrit :

Je pense que l'on peut trés bien réfléchir sans faire de la philo. Attention, j'ai pas dit que les philosophes étaient des abrutis, ce sont au contraire des gens brillants.
 
Maintenant, donne moi un exemple où la philo a fait progresser l'humanité. La philo, pas les philosophes.


 
Le siècle des lumières?

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 08:40:43    

la philo est une matière de reflexion.
bref, je crois que les lyceen devrai avoir 6 heures minumium de philo par semaine...histoire d'etre un peu plus mature  

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 08:43:30    

andhar a écrit :

Je pense que l'on peut trés bien réfléchir sans faire de la philo. Attention, j'ai pas dit que les philosophes étaient des abrutis, ce sont au contraire des gens brillants.
 
Maintenant, donne moi un exemple où la philo a fait progresser l'humanité. La philo, pas les philosophes.


 
 
un mec qui fait de la philo peut se demander a un moment donné si faire telle ou telle action est une bonne chose..il peut se remettre en question etc etc..
c'est sur ce point que la philo  fait progresser l'humanité..elle "humanise les homme", leur donne els moyen de réflechir et de ne pas gaspiller leur capacité.
 
explications
 
 [:vyse_drake] l'home est un animal doué de raison

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 08:47:29    

Prozac a écrit :

Je viens de jeter un coup d'oeil sur les sujets du bac de cette année. Par exemple, j'aime bien le sujet "Etre libre, est-ce ne rencontrer aucun obstacle ?".


 
j'aurai repondu, etre libre c'est pourvoir se fier a ses instinct et choisir une réponse adapté selon ses idéé, idéologie, motivation a un probleme ou une question ou un obstacle malgrès de nombreuses contraintes
 

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 08:49:10    

La philosophie est une discipline passionnante, qui dans une certaine mesure, nous éclaire sur le monde qui nous entoure et sur la position de l'Homme dans l'Univers.
C'est un complément indispensable de la Science (bio-éthique, espace infini, vie extra terrestre)
 
Je crois que c'est une erreur de l'enseigner à des ado boutonneux de 17 ans, dont la grande majorité ne s'interesse qu'à la taille de leur penis ou le volume de la poitrine de la voisine.


Message édité par lebidibule le 10-06-2005 à 08:49:32
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Marsh Posté le 10-06-2005 à 08:49:51    

J'ai bien entendu eu 17 ans.

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 08:51:41    

lebidibule a écrit :

La philosophie est une discipline passionnante, qui dans une certaine mesure, nous éclaire sur le monde qui nous entoure et sur la position de l'Homme dans l'Univers.
C'est un complément indispensable de la Science (bio-éthique, espace infini, vie extra terrestre)
 
Je crois que c'est une erreur de l'enseigner à des ado boutonneux de 17 ans, dont la grande majorité ne s'interesse qu'à la taille de leur penis ou le volume de la poitrine de la voisine.


 
 
elle eclaire pas du tt sur les mystere LOL (les philosophe cherche mais on nous demande pas de chercher en terminale lol)
elle nous aide a reflechir.  
 
erreur de l'enseigner a des mec de 17 ans ???
 [:vyse_drake] fo murir un peu mon jeune padawan

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 08:57:07    

C'est mon point du vue.
Et je le partage.
Libre à toi de penser différemment

Reply

Marsh Posté le 10-06-2005 à 08:58:11    

lebidibule a écrit :

C'est mon point du vue.
Et je le partage.
Libre à toi de penser différemment


 
justement, la philo cest pour penser..et pas forcement de la meme manière.
mais il fo aussi savoir argumenter ses réponses et pas jouer au mini moi  [:kfman]  
 [:whitemagician]

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 08:59:01    

lebidibule a écrit :

La philosophie est une discipline passionnante, qui dans une certaine mesure, nous éclaire sur le monde qui nous entoure et sur la position de l'Homme dans l'Univers.
C'est un complément indispensable de la Science (bio-éthique, espace infini, vie extra terrestre)
 
Je crois que c'est une erreur de l'enseigner à des ado boutonneux de 17 ans, dont la grande majorité ne s'interesse qu'à la taille de leur penis ou le volume de la poitrine de la voisine.


 
et l'égalité homme femme dans tout ça  :whistle:  


---------------
.
Reply

Marsh Posté le 10-06-2005 à 09:00:23    

lebidibule a écrit :

C'est mon point du vue.
Et je le partage.
Libre à toi de penser différemment


 
 
moi mon prof en philo on parlais de kama sutra toute les 20 premiere minutes de chaque cours. c'était TOP! ont a bien réfléchis sur ce sujet.
mais remarque que je suis pas devenu un ange pour autant :D  
 [:whitemagician]

Reply

Marsh Posté le 10-06-2005 à 09:01:21    

patapon a écrit :

et l'égalité homme femme dans tout ça  :whistle:


 
tu veu dire quoi par la?

Reply

Marsh Posté le 10-06-2005 à 09:22:01    

lebidibule a écrit :

La philosophie est une discipline passionnante, qui dans une certaine mesure, nous éclaire sur le monde qui nous entoure et sur la position de l'Homme dans l'Univers.
C'est un complément indispensable de la Science (bio-éthique, espace infini, vie extra terrestre)
 
Je crois que c'est une erreur de l'enseigner à des ado boutonneux de 17 ans, dont la grande majorité ne s'interesse qu'à la taille de leur penis ou le volume de la poitrine de la voisine.


 
T'es vraiment trop atteint comme gars toi!!!! Tu vas le caser partout ça ou quoi:vie extra terrestre???

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 09:29:24    

otin a écrit :

la philo est une matière de reflexion.
bref, je crois que les lyceen devrai avoir 6 heures minumium de philo par semaine...histoire d'etre un peu plus mature


 
faudrait pas déconner non plus  :lol:  
Il y a des priorités dans les matières tout de même, donc hors les sections littéraires 2h/semaine c'est bien assez. Il ne faut pas oublier que la philo au lycée reste de l'initiation, et qu'il est de toute façon impossible d'aller plus loin étant donné le niveau général des éléves en français.

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 10:44:07    

berber64 a écrit :

T'es vraiment trop atteint comme gars toi!!!! Tu vas le caser partout ça ou quoi:vie extra terrestre???


 
et ben nous fait pas une crise d'apoplexie mon vieux
Ou as tu vu que je parlais de vie ET ailleurs ?
 
Je parle de la probabilité de l'existence d'une vie ET et des conséquences sur l'etre humain d'un point de vue philosophique (anthropocentrisme, place dans l'Univers et tout et tout...)
Vie ET ça peut tout à faire correspondre à la découverte d'une bactérie ou d'un champignon.
 
Au vu de ta réaction, je comprends bien mieux la teneur de tes messages sur d'autres topics...
 :pfff: :D


Message édité par lebidibule le 10-06-2005 à 10:45:10
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Marsh Posté le 10-06-2005 à 10:50:10    

otin a écrit :

la philo est une matière de reflexion.
bref, je crois que les lyceen devrai avoir 6 heures minumium de philo par semaine...histoire d'etre un peu plus mature


 
Matière pourrie.
 
On y apprend pas à réfléchir, simplement à resortir des noms de philosophes associés à leurs idées...
 
Maintenant, si on parle de la philosophie elle-même, là je suis plutôt d'accord, ceci dit 2h/semaine c'est déjà pas mal... si on les remplit bien.


Message édité par Gigathlon le 10-06-2005 à 12:28:18
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Marsh Posté le 10-06-2005 à 10:55:14    

A quoi sert la philosophie ?
 
Pour " apporter de l'eau à votre moulin ", voici cette petite étude, niveau terminale. Oui, je sais, c'est très long : avant de crier au scandale, faite l'effort de tout lire car vous pourrez ensuite discuter entre vous certaines idées... Bonne lecture !
 
Littéralement, la philosophia ou philosophie est l’amour de la sagesse. Mais au lieu de désigner simplement la prudence de l’homme instruit par l’expérience, capable d’agir efficacement, la sagesse consiste d'abord en une connaissance intelligible (à la fois universelle, théorique et désintéressée) de l’homme en situation (il s'agit de définir l’humain en l’homme) capable d’éclairer son action. Dépourvue de toute fin pratique immédiate, elle ne doit pas être confondue avec le savoir-faire de l’artisan (sophia). C’est pourquoi, la philosophie heurte et déçoit une conscience exigeant toujours davantage de techniques qui puissent servir à une maîtrise effective du monde, de la vie, ou encore des individus eux-mêmes. Sans effet ni portée dans les contextes actuels de vie (probablement de plus en plus difficiles), la philosophie apparaît comme une activité culturellement dépassée qu’il est inutile, voire dangereux de continuer à pratiquer. La philosophie ne permet pas de vivre !
 
Cependant, si la philosophie n’est pas nécessaire à la vie, elle est aussi " la seule des sciences qui soit libérale " (cf. Aristote, Métaphysique) : elle résulte de la libération à l’égard des besoins (alors que les autres sciences restent asservies à des fins utilitaires), mais surtout elle contribue elle-même à cette libération, puisqu’elle enseigne une attitude désintéressée et délivre de cette forme de dépendance qu’est l’ignorance. En ce sens, la philosophie a d’abord pour vocation d’être une démarche réflexive et critique : loin d’être un savoir sans contenus ni objet (justifiant sa propre disparition), la philosophie est l’élément moteur au centre des autres disciplines (pas de réel progrès sans une réflexion philosophique sur les fondements). C’est dire que la philosophie est indispensable comme entreprise indépendante destructrice des multiples illusions qui nous dépossèdent de notre liberté de penser et nous empêchent de découvrir les principes qui seuls peuvent donner sens à nos actions.
 
La question posée demande que nous interrogions le jugement lapidaire selon lequel la philosophie serait détachée du monde moderne sous le prétexte qu'elle est inutile à l'action. N'y a t-il pas une forme " d'utilité " de la philosophie sous la forme d'une science des principes (elle-même dépendant d’une attitude proprement philosophique de détachement) capitale pour définir les moyens et les fins de l'action individuelle et collective. Mais, en définitive, si une telle question nous réclame inévitablement un bilan des avantages de la philosophie elle exige, beaucoup plus fondamentalement, une interrogation sur la notion même d’utilité, puisque c’est dans l’écheveau du rapport entre fin et moyen qu’il s’agit de situer la philosophie.
 
La philosophie apparaît aujourd’hui, au premier abord, comme un jeu gratuit pour l’esprit ou, pire encore, comme une sorte de maladie du langage (la parole sophistique), dans une société entièrement tournée vers l’efficacité scientifique et technique, ayant depuis longtemps dissocié le savoir (objectif) de la sagesse (un simple art de vivre) pour l’ériger en soutien du pouvoir. En ce sens, il se pourrait qu’on doive la décrire comme nuisible voire dangereuse. Il y a des arguments : Le philosophe se retrouve coupé de la réalité, son immersion dans la mer des livres lui donne un type de connaissance qui n’est pas celui de la vie. C’est du reste par la reconnaissance de ce fait qu’a commencé l’histoire de la philosophie, puisque le philosophes Thalès, l’un des premiers, est décrit comme tombant dans un puits parce que, lourd symbole, il a regardé les astres. La métaphore de l’albatros qui vaut si bien pour le poète convient aussi au philosophe. C’est pour des raisons de ce genre que Jean-Jacques Rousseau se défie des livres. Qu’on mette le philosophe dans un livre, et il faudra répondre à un livre par un livre, les textes susciteront les textes et le livre deviendra un doublet poussiéreux du monde dont personne ne sortira jamais. Fait pour rapprocher de la réalité, le livre en éloigne définitivement. Impossible de rencontrer dans les livres la figure charnelle d’autrui. C’est pourquoi, cet homme qui a tant lu demande qu’on préserve Emile de toute lecture, si ce n’est celle de Robinson Crusoé. La leçon de Rousseau est aussi celle de Socrate, qui n’a jamais consenti à écrire et pour qui il n’existe de philosophie que si elle se confond avec la vie, une vie en laquelle elle se résorbe sans connaître les moments de la représentation ou de la leçon.
 
Tel est encore, en un sens, la leçon de la morale par provision. Descartes sait qu’on n’a pas toujours le temps de réfléchir sur chaque chose, et que nombre de nos actes doivent être engagés avant de savoir ; celui qui voudrait disposer d’une philosophie de mariage avant de se marier finirait célibataire ! La philosophie tire les leçons de ce qui est, nous prévient Hegel dans une image célèbre (la philosophie est comme " l’oiseau de Minerve qui ne prend son envol qu’à la tombée du crépuscule ", cf. Hegel, Principes de la Philosophie du Droit, Préface) mais n’en sait jamais assez pour permettre l’action. La philosophie est privée d’utilité, puisqu’elle se découvre ne pas appartenir à l’horizon pratique, venir toujours trop tard et s’écrire " avec du gris sur du gris " (cf. Ibidem).
 
L’argument de la désaffection n’est pas à négliger non plus : la majorité des hommes, dit-on, se passe de la philosophie. En tient lieu, pour ces gens, quelque vague religiosité, la pratique des règles morales courantes ou, plus prosaïquement, la recherche du bien-être. Or, du point de vue du bien-être, on peut dire que la philosophie constitue un empêchement puisqu’elle tend à privilégier la qualité de la pensée dans son exercice d'interrogation et son effort de compréhension par rapport à un enrichissement quantitatif du savoir. A l'intelligence désincarnée et manipulatrice du scientifique spécialisé, objectif, détaché de sa propre humanité, la philosophie oppose, en effet, la pensée réfléchie de l'homme profondément engagé dans le milieu humain où il est appelé à vivre et jouer son rôle et qui, de fait, s'interroge sur lui-même, sur le monde et sur les problèmes posés par sa situation dans ce monde. Philosopher, c'est s'orienter dans la pensée c'est-à-dire se mettre soi-même en question. Mais c'est aussi privilégier un mode de penser et poser un certain type de question. La philosophie, en effet, ne consiste pas seulement à penser par concepts (la science se fonde précisément sur cette capacité), mais à percevoir la signification générale de l'expérience concrète ; elle est l'affirmation de la capacité humaine de passer du singulier à l'universel. Or, dans cet effort vers l'universalité, l'homme-philosophe se retrouve. Son élévation vers les hauteurs de la pensée abstraite et générale est la condition d'une compréhension plus juste de son existence concrète et singulière : s’interroger sur les valeurs et les fins qui permettent de définir l’humain, c’est d’abord, pour l’homme-philosophe, ressaisir sa propre vérité intérieure. S'oublier dans la saisie intellectuelle d'une vérité universelle qui s'impose par son évidence, c'est se séparer de soi, c'est-à-dire aliéner sa subjectivité unilatérale, pour mieux se retrouver soi-même comme subjectivité devenue, comme expression vivante de cet universel-singulier qu'est la pensée consciente d'elle-même comme pensée (on voit par-là que la science, en tant précisément qu’elle se veut une activité consciente de ses objectifs et de ses résultats, ne contredit pas cette logique de la conscience de soi : dans chacune des découvertes spécialisées se trouve la possibilité pour le sujet de se découvrir lui-même comme source universelle de vérité, comme pouvoir de connaître s'actualisant dans l'histoire selon les modalités du temps).
 
En tant que réflexion sur la condition humaine, la philosophie est donc une activité totalement désintéressée qui trouve sa signification beaucoup plus dans les questions que le philosophe est amené à poser que dans ses réponses éventuelles. Son rejet par les hommes provient alors de la nécessité de pratiquer un doute universel et méthodique c'est-à-dire de rejeter les croyances toutes faites, d'élucider les multiples illusions qui transforment notre pouvoir d'agir (notre libre-arbitre) en aveuglement et impuissance. Car, en général, les individus veulent croire sans douter.
 
Fondamentalement, la philosophie est une activité de réflexion. Or, ce terme de " réflexion " implique en philosophie l’idée d’une direction nouvelle de la conscience : au lieu de se diriger vers les choses, les notions, les événements pour les connaître ou les comprendre, au lieu de sortir d’elle-même, d’investir le monde pour s’en rendre maîtresse par la pensée technicienne et le transformer par l’action, la conscience philosophique fait retour sur elle-même. Plutôt que d’utiliser les pouvoirs de la raison à des fins extérieures, l’homme qui passe à la philosophie comprend qu’il lui faut cette fois examiner la raison elle-même afin de connaître ses pouvoirs mais aussi ses limites. Cette attitude sera celle de Kant, par exemple, dans la Critique de la Raison Pure : la raison devra être " juge d’elle-même ". Ainsi, en tant qu’entreprise critique, la philosophie doit interroger, à l’intérieur de notre langage, la tendance irréductible de notre raison à présupposer un " être " des choses qui serait " plus vrai " que leur apparence, plus haut que ce que nous en percevons. Autrement dit, la philosophie devra prendre position contre sa propre prétention à s’élever vers un " au-delà " métaphysique, à sortir du cadre de l’expérience pour connaître l’absolu, l’inconditionné.
 
Sur ce point, l’attitude de Kant est exemplaire : philosopher ne consiste pas à apprendre des doctrines, à trouver des réponses toutes faites et rassurantes aux angoisses que génèrent nos conditions d’existences ; philosopher, ce n’est pas fuir dans un " au-delà mystique ", retrouver un " objet " qui, parce qu’il a la perfection du divin, ne pourra jamais nous décevoir, mais c’est avoir le courage de " penser par soi-même " c’est-à-dire faire face à son ignorance. La philosophie, en ce sens, est d’abord un parcours individuel qui rend nécessaire la pratique des grandes philosophies du passé mais seulement parce que celles-ci permettent de thématiser, sous la forme de questions " officielles ", les inévitables inquiétudes métaphysiques de l’homme et ainsi de renvoyer chacun à son propre questionnement intérieur.
 
Si les questions, en philosophie, comptent plus que les réponses elles concernent avant tout le statut des évidences, aussi bien sur le plan de la connaissance que sur celui de la morale. Il s’agit de déterminer avec certitude la vérité ou la fausseté de nos savoirs ainsi que le bien ou le mal de nos actions. Le doute apparaît justement lorsque l’esprit ne peut pas ou hésite à se prononcer sur la valeur de ces réalités. Cependant, le doute ne procède pas toujours d’une réflexion proprement philosophique, c’est-à-dire d’une volonté ferme et constante de fonder nos connaissances et nos pratiques sur des principes rationnels valables universellement. C’est le cas du doute spontané tel qu’il apparaît au début du §.1 dans les Méditations Métaphysiques. Descartes, en effet, commence par " s’apercevoir " que, parmi toutes ses connaissances, certaines se sont déjà révélées fausses, rendant suspectes toutes les autres. Son doute apparaît alors comme un doute naturel, surgissant à l’occasion d’un problème localisé et limité : Descartes découvre ses erreurs par hasard, de façon accidentelle. Le doute ici est une réaction de défense spontanée de l’esprit devant une incohérence ou une contradiction qui soudain se fait jour. Mais il s’agit alors d’un doute soumis aux passions, dépendant des circonstances, bref exprimant un sentiment de trouble et non une volonté déterminée, une décision libre.
 
La faiblesse du doute spontané apparaît surtout lorsque l’urgence de l’action amène, pour la conduite de la vie, à sacrifier la vérité à la vraisemblance. En effet, la morale par provision, présentée par Descartes dans la 3e partie du Discours de la Méthode, précise que l’occasion n’attend pas et que le temps est toujours mesuré à l’homme d’action. Il faut donc écourter la délibération et agir sans attendre la certitude absolue. Descartes substitue, pour la conduite de la vie ordinaire, à l’évidence du bien, la représentation probable du meilleur. Autrement dit, le doute spontané doit toujours s’arrêter devant :
 
- le principe général et qui n’est pas susceptible de progrès que, mieux vaut suivre le parti le plus vraisemblable, que d’atermoyer (cf. seconde maxime).
 
- une vérité plus particulière et que le temps peut corriger, à savoir que le choix doit se faire selon la probabilité que tel parti est, en conscience, le meilleur (cf. première maxime). Cette règle se retrouve d’ailleurs dans la troisième maxime qui met fin au doute en :
 
- subordonnant le mouvement spontané du désir à une double limite interne, du possible (il suffit de se représenter un bien comme impossible pour ne plus avoir sujet de le désirer), et du souhaitable (« puisque la volonté ne se porte à suivre ou à fuir une chose que selon que l’entendement la lui représente bonne ou mauvaise », elle ne peut donc désirer le mal que si l’entendement y aperçoit quelque apparence de bien : il est impossible de vouloir le mal en tant que tel et sans raison).
 
Si le doute spontané ne permet pas de fonder nos savoirs et nos pratiques, en revanche il est possible d’en tirer une règle pour le jugement : l’expérience de l’erreur révèle une faiblesse dans la nature humaine dont il faut alors se prémunir en adoptant une attitude de méfiance systématique à l’égard de toutes les vérités qui veulent s’imposer à l’esprit par l’autorité. Mais ce doute " méthodique " n’est guère différent du doute sceptique et semble rendre définitivement impossible le projet philosophique défini par Descartes " d’établir quelque chose de ferme et de constant dans les sciences " (cf. Méditation première, §.1).
 
Pour mener à bien la réflexion philosophique et s’élever jusqu’aux principes, il faut donc sortir de l’enfermement du doute sceptique et faire du doute une entreprise volontaire dont la finalité est, justement, de sortir du doute (douter " une fois en sa vie ", une fois pour toutes).
 
Le doute cartésien est donc une décision forcée et, comme tel, ne relève pas de mobiles pathologiques. Il est une démarche entièrement rationnelle qui tente d’échapper au doute en soulevant toutes les raisons possibles et imaginables de douter, y compris les plus folles, les moins raisonnables en apparence (cf. l’argument de la folie : Méditation première, §.4, l’argument du rêve : idem, §.5, l’argument du Dieu trompeur : idem, §.9, etc...). Descartes va développer un doute méthodique qui sort totalement du cadre étroit de la vraisemblance qu’imposent les conditions extérieures de l’existence : Il s’agit de douter de tout et pour cela ce doute doit être à la fois hyperbolique (imposer le passage du douteux, c’est-à-dire du seulement probable, au faux) et radical (douter, non pas de chaque chose, ce qui est impossible, mais des fondements, en trouvant des raisons générales et simples). Radicaliser le questionnement, c’est précisément l’étendre également à tous les domaines possibles. Car l’évidence, qui fonde la vérité, doit reposer sur l’absence de toute raison de douter. Si le doute se limite aux exigences de réussite et d’efficacité dans tel ou tel domaine particulier, il est donc incapable de procurer aux plus évidentes raisons l’occasion d’apparaître : il faut présenter les raisons de douter les plus fortes pour que les évidences fassent la preuve de leur véracité en lui résistant. Mais ainsi, l’esprit peut, au terme de la démarche, accéder à une croyance d’une nature nouvelle, reposant sur la certitude des évidences rationnelles.
 
Ainsi, le détachement est la condition de tout savoir authentique. C'est ce qu'illustre aussi fort bien l'allégorie de la caverne chez Platon. Alors que la méthode dialectique, en particulier dans le dialogue bien conduit, a pour but, non pas d’apprendre un savoir, mais de faire prendre conscience qu’on ne sait pas, provoquant ainsi le désir d’apprendre, l'attitude commune consiste au contraire à adhérer à des représentations sans les questionner. En effet, la réalité première est la réalité concrète de l'homme en situation cherchant, par la conscience, à maîtriser son rapport au monde, à se le représenter afin de donner un sens à son existence. Or, cette quête d’un sens prend d'abord la forme d’une entreprise de justification de ce qui est c'est-à-dire des pesanteurs et des limites qui nous font souffrir. La condition première de l'homme en situation est celle d'une aliénation idéologique : Au lieu d'offrir les moyens d’une réappropriation critique et objective de ce qui nous entoure et nous détermine, nos représentations ne servent qu’à masquer, à cacher le sens véritable de la réalité vécue, à rendre acceptable, admissible, ce qui autrement rendrait l'existence insupportable. En s'opposant à l'illusion d'un pouvoir absolu de la volonté (ce qu'on appelle le libre-arbitre), capable de se déterminer par elle-même indépendamment de toute raison déterminante, en considérant la volonté d’abord comme passion (elle exprime l'extériorité) et non comme action (pure causalité), en privilégiant de ce fait une démarche réflexive dont la fonction est de problématiser les représentations ordinaires, de réélaborer de manière critique les cadres psychologiques et affectifs de notre existence, les valeurs idéologiques transformées en dogmes ou en traditions, la philosophie ne peut donc que s'attirer les foudres de la communauté des hommes qui ne voit en elle, au mieux, qu'une discipline iconoclaste incapable de servir les désirs des hommes.
 
En tant que réflexion, la philosophie au contraire est une source de souffrance ; comme le montre Platon dans le mythe de la caverne, elle puise dans la douleur de l'homme qui a le courage de se détourner de l'obscurité rassurante ou se déroule son existence, pour s'orienter vers la lumière éclatante du soleil de la connaissance, le moteur de la recherche et de l'étude. Contrairement à la science dont la réussite et les succès proviennent de ses résultats positifs, mais dont le bruit triomphant couvre aussi les soupirs et les plaintes du sujet métaphysique et moral, la réflexion philosophique est essentiellement une activité de nettoyage critique de l'esprit dont le sujet ne peut tirer qu’un sentiment de malaise, d’embarras (aporia). Cette étape de " détachement " (lysis), d’affranchissement par rapport au passé, qui cependant nous tourne du côté qu’il faut et nous pousse en avant, exige donc des prédispositions naturelles, pas seulement intellectuelles, mais aussi morales : avoir la force de résister à toutes les séductions, à toutes les fatigues, à toutes les craintes. Telle est l'exemple que nous donne Platon dans le Ménon. Ménon éprouve pour la première fois cette incertitude angoissée devant la conscience de l’opposition entre ce qu'il croyait savoir et ce qu’en réalité il ignore. Son esprit se sent alors paralysé, engourdi, par la perplexité et le doute concernant son illusion de savoir. C’est pourquoi, Ménon ne peut profiter de son propre embarras ; car au lieu de faire face et d'assumer son ignorance, il prétend être libre d’aller où bon lui semble et d’adhérer à des vérités qui lui sont familières plutôt que de rechercher la vérité. De même, dans le Théétète, Platon compare le désarroi de l'esprit, au moment où il s'aperçoit que quelque chose germe en lui, aux douleurs de l'enfantement. L'homme lâche ou intéressé, l'homme dont les qualités naturelles ont été corrompues par les conditions extérieures, principalement sociales, a donc de " bonnes raisons " de ne pas pratiquer la réflexion philosophique.
 
Mais le nom de Socrate nous invite à reconnaître, non seulement le risque pour le confort intellectuel, mais aussi le danger mortel de la philosophie, insupportable au non philosophe qui veut détruire le philosophe. Premier d’un long martyrologe, Socrate ne risque-t-il pas de nous engager dans la voie d’une intégration dans un ordre constitué en valeur suprême : malheur à celui par qui le scandale arrive. Mieux vaut la tranquillité d’un ordre de compromission théorique que la mise à mort ou la persécution. Ainsi parle la lâcheté mais aussi la considération de l’ordre social qui n’est pas qu’un regard sans honneur, car le désordre fait des victimes sans bénéfice. Ne s’est il pas trouvé des analystes pour considérer que la Révolution Française n’avait rien changé.  Alors, mort... où est ta victoire ?
 
On ne reproche pas seulement à la philosophie ses insuffisances sur le plan pratique mais aussi une radicale inutilité du point de vue théorique. L’histoire de la philosophie semble offrir le spectacle d’un cimetière de doctrines qui se succèdent et se détruisent sans apporter de réponse définitive aux questions qu'elles soulèvent. Pire ! Dire de la philosophie, comme nous l'avons fait, quelle est une perpétuelle remise en question et que les problèmes quelle soulève sont plus importants que les réponses qu’elle propose risque de faire effectivement considérer l'histoire de la philosophie sinon comme un cimetière du moins comme un musée. A cause de sa multiplicité ou de sa nature réflexive, la philosophie passe pour une discipline seulement capable de s'intéresser à des problèmes insolubles, contrairement à la science qui progresse en apportant des réponses efficaces. Du point de vue théorique elle apparaît donc totalement inutile. N’est-elle pas semblable au vain travail de Sisyphe condamné par les dieux à hisser sur une montagne un rocher qui lui échappait sans cesse ? C'est une mince consolation de dire, comme Roger Caillois : " Il n’y a pas de travail inutile : Sisyphe se faisait les muscles. " L'homme préfère toujours exercer son corps et son esprit sur des travaux dont le sens lui est clair. S'il n'y a pas de progrès philosophique, à quoi bon philosopher ? Et s'il y a un progrès philosophique, en quoi consiste-t-il ?
 
Si l'on affirme maintenant que la philosophie consiste en une réflexion personnelle, laquelle exigerait un engagement dont le sens ne saurait être remis en question par le progrès scientifique, un nouvel argument surgit alors pour reprocher à la réflexion sa subjectivité. A l'objectivité de la science qui établit des relations s'imposant nécessairement à l'esprit de tous, on oppose la subjectivité des systèmes philosophiques, en tant que constructions arbitraires reflétant simplement l’opinion personnelle d’un auteur. Cette subjectivité de la philosophie explique le dédain pour l'enseignement rigoureux et approfondi qu'elle propose, puisqu'on peut alors considérer que toutes les questions philosophiques ne possèdent que des réponses individuelles, personnelles et privées.
 
Cependant, aucun de ces arguments ne sauraient venir à bout d’une activité qui trouve toujours en elle-même sa raison d’être et sa justification.
 
En effet, l'argument de constatation selon lequel la majorité des hommes ne pratique pas la philosophie parce que celle-ci serait inutile, est d’une valeur bien médiocre. Le consensus ne peut servir d’argument valable contre la philosophie car les erreurs sont aussi collectives. Se sont même celles qui sont le plus difficile à déraciner précisément parce qu’elles sont pour l'individu le moyen de s'intégrer dans le milieu social, de se retrouver en situation. Si le rejet de la philosophie émane d'un jugement collectif, souvent pour des raisons politiques, la conscience individuelle, prédisposée comme nous l'avons vu à fuir la tâche courageuse de réfléchir le monde, ne peut que s'y complaire. L'hostilité à l'égard de la philosophie n'a rien de théorique et d'idéaliste : elle ne répond pas, comme dans la critique marxiste, à la dénonciation des idéologies, ni comme chez Nietzsche, à une généalogie des principes moraux, mais à une volonté de maîtriser les libertés individuelles, de dominer le social dans ses effets, pervers pour la finalité et l'ambition des pouvoirs, d'élévation vers des idéaux d’égalité et de justice. Par ailleurs, la philosophie n’est pas la seule discipline à être rejetée par la majorité des hommes. Le nombre ici ne fait rien à l'affaire. La grande masse des hommes ne s'intéresse pas plus à la philosophie qu'à la science ou à la littérature. Cela prouve uniquement qu’un grand effort d'éducation reste à accomplir. La philosophie est sans doute d'un abord difficile, mais la majorité des hommes n'est nullement indifférente aux thèmes de la réflexion qu'elle propose. Tout homme au contraire est intéressé, concerné, par les questions qu'elle soulève puisque celles-ci convergent toutes vers l'homme lui-même et les grands problèmes humains. On retrouve ici les trois grandes questions dont Kant disait qu'elles représentaient l'ensemble du programme de la  philosophie : " Que pouvons nous connaître ? Que devons nous faire ? Que pouvons nous espérer ? " Ces questions répondent aux préoccupations de tout homme, philosophe ou non. Elles n'émanent pas d'un besoin du coeur (la philosophie serait fille du sentiment), puisque dans ce cas l'échec historique de la Métaphysique comme science, les aurait depuis longtemps fait disparaître. Ces questions émanent d'un besoin de la raison humaine. Elles ne relèvent pas du contenu spécifique des grands systèmes philosophiques, mais d’un besoin irréductible de la raison dont nous pouvons voir les effets dans les questions parfois surprenantes des enfants, au moment ou leur quête d'absolu commence à s'éveiller et avant que des préoccupations plus ordinaires ne s'imposent et les fassent disparaître. L'origine de l'homme, son destin, le pourquoi de son existence, le problème du mal, la coexistence de l'ordre et du désordre, la raison d'être de l'ordre du monde (pourquoi y a-t-il des lois scientifiques et pourquoi sont-elles ce quelles sont et non pas autres ?), le sens même de mon être et de l'être en général (pour-quoi suis-je ? pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ?), telles sont les grandes questions qui définissent les inévitables inquiétudes que l'homme cultive sous le nom de philosophie. La philosophie, de ce point de vue, est donc nécessaire puisqu'elle permet, en thématisant ces questions, de renvoyer tout homme à son propre questionnement intérieur. De manière plus terre-à-terre, il apparaît également que les hommes ont des raisons vitales de s'intéresser à la politique. Or, toute éducation politique s'appuie sur une philosophie plus ou moins explicite (par exemple la politique marxiste s'appuie sur le matérialisme dialectique). Aujourd'hui et plus que jamais, la philosophie est un besoin dont nous constatons l'existence. Ce besoin dépasse l'étonnement ou le séculaire désir de connaître que maintes disciplines peuvent satisfaire. Au contraire, il est en grande partie issu des questions auxquelles ces disciplines ne peuvent répondre. Le besoin philosophique se manifeste " en laissant libre cours aux interrogations que l'homme porte en lui et que l'envoûtement par les techniques et la crainte de nouvelles mystifications idéologiques l'empêchent d'exprimer ". Ainsi la philosophie est plus que jamais nécessaire puisqu’elle exprime " ce besoin irrépressible que la technicisation de l'existence a purifié et exaspéré au lieu d'abolir " (cf. Fougeyrollas, La philosophie en question).
 
Certes, l’exercice philosophie, surtout sous sa forme systématique, demeure pour beaucoup impraticable, inaccessible. Mais cette difficulté existe surtout parce que la réflexion exige une activité de l'esprit qui s'oppose à l'acceptation passive des évidences. De ce point de vue, la philosophie répond à l'accusation d’être une forme de culture purement historique c'est-à-dire sans cesse dépassée par l’évolution de la réalité. En effet, dire de la philosophie qu’elle est inutile parce que son histoire est comparable à un musée présentant des doctrines périmées, c'est oublier que la philosophie est d'abord un parcours. Cela signifie que chacun doit tenter de résoudre pour lui-même les grandes questions qui intéressent le destin de l'homme en général. Mais une telle démarche n'est possible que si l'on prend la peine d'étudier les concepts dont chacune des grandes philosophies du passé est porteuse, afin de pouvoir confronter l’expérience singulière que l’on vit dans l'immédiateté et la relativité unilatérale du moment, à l'expérience fondamentale des essences, de ce qui échappe aux fluctuations de la subjectivité, à la succession anarchique des contraires. Car la philosophie (présente dans toutes les philosophies du passé) a pour fonction de déterminer les principes, de connaissance et d’action, voire de religiosité, comme ajoute Kant. Sans principe, je ne peux agir. Ce n’est que si la philosophie détermine la ligne générale de mon action que je puis avoir une pratique. Les grands engagements de la vie ne peuvent se concevoir sans pensée, faute de virer à l’empirisme dans ce qu’il a de plus aléatoire, ou au fidéisme dans ce qu’il a de plus aliénant. Si je choisis un métier, un conjoint, un engagement, sans philosophie, je me découvrirai un jour victime de l’imaginaire qui avait présidé à mon choix. En ce sens, la morale par provision ne peut rivaliser avec une véritable éthique.
 
Il ne s'agit pas d'adopter telle ou telle grande philosophie mais, en s'aidant des philosophies existantes, de s'entraîner à construire sa propre philosophie. Apprendre à philosopher c'est adopter pour devise cette phrase de Kant : " jusqu'ici, il n’y a pas de philosophie qu'on puisse apprendre, car où est-elle ? Qui l'a en sa possession, et à quels caractères la reconnaître ? On ne peut qu'apprendre à philosopher ". Apprendre à philosopher, c'est ne pas refuser d’examiner un problème sous prétexte qu'il est insoluble tant qu’on n’a pas déterminé par soi-même ce qu'il est convenu d'appeler la solution d'un problème. En ce sens, le service suprême de la philosophie, c'est de faire du philosophe un homme qui n’a pas peur de penser, c’est-à-dire de conquérir sa liberté. Ainsi, si on ne peut parler d'un progrès philosophique au sens ou l'on parle du progrès des sciences (accumulation des connaissances, création de nouvelles lois, précision des mesures, etc...), le progrès philosophique existe néanmoins. Il consiste dans le renouvellement, dans la réactualisation des grandes questions philosophiques, sous l'effet d’une pensée qui se cherche elle-même, qui commence absolument à chaque fois qu'elle recommence l'étude d'une philosophie. On ne peut donc nier qu’il y ait des réponses, historiquement et philosophiquement déterminées. Mais ces réponses ne sont jamais données comme un savoir que l’on puisse apprendre, mais au contraire comme une occasion de questionner et de discuter c’est-à-dire comme le point de départ d’une pensée personnelle. Les questions manifestent finalement le caractère proprement philosophique de l’histoire de la philosophie, contre le point de vue simplement historique. La philosophie, en effet, n'a pas d’histoire parce que, comme le précise très justement Hegel, l'histoire des idées philosophiques n’est pas une véritable histoire. Certes, la critique des apparences trompeuses dans le mythe de la caverne chez Platon, le cogito chez Descartes, la problématisation de la raison et de l'expérience chez Kant, appartiennent à des moments distincts du développement historique et, comme tels, ne nous concernent pas directement. Mais, au-delà de l'aspect proprement historique, voire idéologique ou contingent, par lequel chaque philosophie est l’expression spontanée de la conscience de son temps, demeure l'aspect proprement philosophique et substantiel, celui par lequel chacune d'elle contient des principes qui n'ont rien d’éphémères puisqu’elles sont des acquisitions de la pensée et font donc partie intégrante de son exercice actuel. Ainsi, non seulement la diversité des philosophies n’est pas un argument contre la philosophie mais, de plus, c'est dans l'histoire de la philosophie que l'esprit philosophique peut se développer puisque dans cette histoire se sont ses propres déterminations logiques que l’esprit retrouve. L'histoire est donc une histoire vivante qui ne se vit jamais au passé mais au présent. La nécessité de la philosophie vient de là : dans l'histoire de la philosophie le sujet singulier se découvre comme raison incarnée selon les multiples et diverses modalités du temps. La philosophie est éternellement jeune puisqu’elle n’est rien d’autre que la manière qu’a le passé de vivre dans le présent, de participer activement à la juste compréhension de ce présent et au mûrissement de l'avenir.
 
Du coup, la philosophie répond à l'argument qui opposait l’objectivité  de la science imposant à l'esprit de tous ses relations nécessaires, à la subjectivité de la pensée philosophique reflétant seulement l'opinion personnelle de son auteur. Dans la mesure où le problème de l'objectivité est lié à celui de l'universalité, la question a été précédemment examinée. La philosophie, en effet, est avant tout une oeuvre de la raison et non l'expression d’un tempérament.
 
Si donc la vérité philosophique n’est pas subjective, il est vrai quelle est et qu’elle ne peut pas ne pas être l'expression d'une personnalité. L'universalité du discours philosophique ne contredit nullement la singularité de l'expérience dans laquelle elle s'enracine. La référence à l'histoire de la philosophie nous l'a bien montré. Si la philosophie est inséparable de la personne qui la pratique c'est parce qu'elle n'est pas la méditation abstraite d’un esprit désintéressé, désincarné, indifférent au monde, mais la réflexion d’un homme sur le sens ultime des expériences dans lesquelles il se trouve lui-même profondément engagé.
 
Ainsi, de nombreux points de positivité éclatent...  et plaident en faveur de la reconnaissance de l’utilité de la philosophie. Mais cette positivité s’inscrit sous la présupposition que la philosophie appartient à l’ordre des moyens. Or, rien n’est moins sûr et il faut statuer sur l’opposition entre fin et moyen. Qu’en est il ?
 
Un moyen est un intermédiaire par lequel on doit passer ou par lequel on peut passer. Si je veux soulever une lourde roche, il me faut un levier : moyen nécessaire. Si je veux me déplacer, je recours à ma voiture : moyen facultatif destiné à me faire gagner du temps, ce qui est souvent intéressant. Les moyens entrent comme outils dans la catégorie générale de la médiation...
 
...or, c’est la définition même de la bêtise que de confondre moyen et fin. Le moyen devient une fin, mais la fin n’est jamais un moyen. La fin n’est jamais en tant que telle relative à une autre fin qu’elle même et c’est bien ce qui l’amène à ne pouvoir supporter la question du pourquoi. Le débutant se laisse piéger par des questions du type " pourquoi vivre ? ", ou " pourquoi être heureux ? ", mais c’est le propre de la fin suprême de ne pouvoir se penser en vue d’une autre fin qu’elle même, ce qu’indique la notion de fin en soi.
 
Il est vrai que les moyens m’apparaissent parfois comme des fins. Ce qui fait que j’ai le plus grand mal à distinguer les fins dernières et les fins relatives à une autre fin implicite. Cela conduit à une définition de l’homme sans philosophie : il ne parvient pas à la clarté téléologique. Le spectacle d’un collectionneur de futilités ou d’un amoureux de sa voiture qui la pare de tous les colifichets possibles confirme ce propos.
 
La philosophie ne saurait être considérée comme un moyen. Elle nomme notre essence intime d’êtres pensants, dont la pensée reconnaît qu’elle est à distance d’elle même. L’homme a la pensée comme destination, comme " entéléchie " selon le vocabulaire d’Aristote. En ce sens, toute philosophie ne serait rien d'autre qu'une anthropologie critique. Dissiper l'illusion d'une objectivité constitutive telle est sa finalité propre. En effet, la subjectivité s'explique, non à partir d'elle-même - le penser -, mais du facticiel - la société, cette dernière correspondant tout autant à un ensemble de sujets individuels qu'à leur négation comme individualités. A l'opposé, l'objectivité de la connaissance ne peut quant à elle être envisagée sans penser, c'est-à-dire sans subjectivité. On peut encore affirmer que toute réalité est toujours appréhendée dans une perspective humaine, soit l'impossibilité d'accéder à une connaissance objective des faits, la subjectivité étant toujours socialement préformée. Rien ne se donne à saisir de manière immédiate, tout est construit : l'interprétation, laquelle en est indissociable, oriente la saisie du fait ; les éléments du réel ne devenant effectivement compréhensibles qu'à partir du moment où on les isole par la pensée en tant que moments singuliers, où on les singularise du tout, ce qui ne peut être le fait que d'un sujet, individuel ou collectif. Dans ces conditions, l'objet propre de la philosophie comme fin en soi, ne peut être que la critique des prétendus savoirs, des systèmes de pensée et de l'esprit de système, des attitudes collectivement partagées, dont la naturalité, l'immédiateté ou l'objectivité se trouveraient ordinairement affirmée alors même qu'ils seraient dans la continuité d'une idéologie, ou historiquement et socialement constitués. Elle exprime cette tension irréductible entre le désir pour la vérité - l'étymologie en fait de manière significative une théorie érotique - et l'attitude fondamentalement subversive de toute vérité possible ouvrant l'espace propre de la réflexion critique. La philosophie n'a pas d'utilité - à proprement parler, elle ne sert à rien -, ne saurait en avoir une. Mais elle reste indispensable en tant que critique, force de résistance de la pensée contre la simple volonté de puissance pour toujours rester maîtresse d'elle-même, permettant de dénoncer toute forme d'adhésion irréfléchie ou d'acquiescement aveugle à quelque autorité que ce soit : de la nature, de l'évidence première, de la bienséance, de la morale, de la compétence, etc..., ou du discours, celui du Maître. Négation ou résistance du penser contre ce qui est imposé ou " s'impose ", c'est-à-dire irait de soi. En ce sens, et dans nos sociétés, elle n'apparaît, ni plus ni moins, que comme le dernier refuge de la liberté de l'individu. Elle ne saurait se renouveler qu'en se confrontant constamment à son objet, lui-même en mouvement, ouvertement et de manière cohérente, sans se laisser prescrire les règles d'un savoir organisé, perçant tout ce que la société a recouvert sur cet objet, forgeant pour ce faire ses concepts, sur le fondement d'une expérience toujours singulière. Le fanatisme réducteur, celui de la science, de la logique à tout prix, de la simplicité, de l'élémentaire, ne lui appartient pas. La référence à la science, à ses règles, à la validité exclusive des méthodes qu'elle a développées, réprime la pensée libre, c'est-à-dire non conditionnée. La liberté du penser signifie aussi la possibilité d'expression de sa non liberté, là où émerge davantage que l'expression : une vue-du-monde préformée et imposée. En ce sens, celui qui tourne le dos à la philosophie tourne le dos à son identité. Il se fuit. Loin de se divertir, il se nie, et cette négation de sa propre humanité se nomme barbarie. C’est pourquoi, la philosophie ne peut penser contre elle ! Dès qu’elle se considère, elle aperçoit la nécessité de sa diffusion : enseignement, certes, mais aussi nécessité de l’instauration d’un climat qui l’entretienne et le vivifie. Nous en sommes loin, mais ce ne peut constituer un argument.

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 11:05:20    

en resume : la philo caÿ bien

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 11:13:37    

l'Antichrist a écrit :

A quoi sert la philosophie ?
 
Pour " apporter de l'eau à votre moulin ", voici cette petite étude, niveau terminale. Oui, je sais, c'est très long : avant de crier au scandale, faite l'effort de tout lire car vous pourrez ensuite discuter entre vous certaines idées... Bonne lecture !
 
Littéralement, la philosophia ou philosophie est l’amour de la sagesse. Mais au lieu de désigner simplement la prudence de l’homme instruit par l’expérience, capable d’agir efficacement, la sagesse consiste d'abord en une connaissance intelligible (à la fois universelle, théorique et désintéressée) de l’homme en situation (il s'agit de définir l’humain en l’homme) capable d’éclairer son action. Dépourvue de toute fin pratique immédiate, elle ne doit pas être confondue avec le savoir-faire de l’artisan (sophia). C’est pourquoi, la philosophie heurte et déçoit une conscience exigeant toujours davantage de techniques qui puissent servir à une maîtrise effective du monde, de la vie, ou encore des individus eux-mêmes. Sans effet ni portée dans les contextes actuels de vie (probablement de plus en plus difficiles), la philosophie apparaît comme une activité culturellement dépassée qu’il est inutile, voire dangereux de continuer à pratiquer. La philosophie ne permet pas de vivre !
 
Cependant, si la philosophie n’est pas nécessaire à la vie, elle est aussi " la seule des sciences qui soit libérale " (cf. Aristote, Métaphysique) : elle résulte de la libération à l’égard des besoins (alors que les autres sciences restent asservies à des fins utilitaires), mais surtout elle contribue elle-même à cette libération, puisqu’elle enseigne une attitude désintéressée et délivre de cette forme de dépendance qu’est l’ignorance. En ce sens, la philosophie a d’abord pour vocation d’être une démarche réflexive et critique : loin d’être un savoir sans contenus ni objet (justifiant sa propre disparition), la philosophie est l’élément moteur au centre des autres disciplines (pas de réel progrès sans une réflexion philosophique sur les fondements). C’est dire que la philosophie est indispensable comme entreprise indépendante destructrice des multiples illusions qui nous dépossèdent de notre liberté de penser et nous empêchent de découvrir les principes qui seuls peuvent donner sens à nos actions.
 
La question posée demande que nous interrogions le jugement lapidaire selon lequel la philosophie serait détachée du monde moderne sous le prétexte qu'elle est inutile à l'action. N'y a t-il pas une forme " d'utilité " de la philosophie sous la forme d'une science des principes (elle-même dépendant d’une attitude proprement philosophique de détachement) capitale pour définir les moyens et les fins de l'action individuelle et collective. Mais, en définitive, si une telle question nous réclame inévitablement un bilan des avantages de la philosophie elle exige, beaucoup plus fondamentalement, une interrogation sur la notion même d’utilité, puisque c’est dans l’écheveau du rapport entre fin et moyen qu’il s’agit de situer la philosophie.
 
La philosophie apparaît aujourd’hui, au premier abord, comme un jeu gratuit pour l’esprit ou, pire encore, comme une sorte de maladie du langage (la parole sophistique), dans une société entièrement tournée vers l’efficacité scientifique et technique, ayant depuis longtemps dissocié le savoir (objectif) de la sagesse (un simple art de vivre) pour l’ériger en soutien du pouvoir. En ce sens, il se pourrait qu’on doive la décrire comme nuisible voire dangereuse. Il y a des arguments : Le philosophe se retrouve coupé de la réalité, son immersion dans la mer des livres lui donne un type de connaissance qui n’est pas celui de la vie. C’est du reste par la reconnaissance de ce fait qu’a commencé l’histoire de la philosophie, puisque le philosophes Thalès, l’un des premiers, est décrit comme tombant dans un puits parce que, lourd symbole, il a regardé les astres. La métaphore de l’albatros qui vaut si bien pour le poète convient aussi au philosophe. C’est pour des raisons de ce genre que Jean-Jacques Rousseau se défie des livres. Qu’on mette le philosophe dans un livre, et il faudra répondre à un livre par un livre, les textes susciteront les textes et le livre deviendra un doublet poussiéreux du monde dont personne ne sortira jamais. Fait pour rapprocher de la réalité, le livre en éloigne définitivement. Impossible de rencontrer dans les livres la figure charnelle d’autrui. C’est pourquoi, cet homme qui a tant lu demande qu’on préserve Emile de toute lecture, si ce n’est celle de Robinson Crusoé. La leçon de Rousseau est aussi celle de Socrate, qui n’a jamais consenti à écrire et pour qui il n’existe de philosophie que si elle se confond avec la vie, une vie en laquelle elle se résorbe sans connaître les moments de la représentation ou de la leçon.
 
Tel est encore, en un sens, la leçon de la morale par provision. Descartes sait qu’on n’a pas toujours le temps de réfléchir sur chaque chose, et que nombre de nos actes doivent être engagés avant de savoir ; celui qui voudrait disposer d’une philosophie de mariage avant de se marier finirait célibataire ! La philosophie tire les leçons de ce qui est, nous prévient Hegel dans une image célèbre (la philosophie est comme " l’oiseau de Minerve qui ne prend son envol qu’à la tombée du crépuscule ", cf. Hegel, Principes de la Philosophie du Droit, Préface) mais n’en sait jamais assez pour permettre l’action. La philosophie est privée d’utilité, puisqu’elle se découvre ne pas appartenir à l’horizon pratique, venir toujours trop tard et s’écrire " avec du gris sur du gris " (cf. Ibidem).
 
L’argument de la désaffection n’est pas à négliger non plus : la majorité des hommes, dit-on, se passe de la philosophie. En tient lieu, pour ces gens, quelque vague religiosité, la pratique des règles morales courantes ou, plus prosaïquement, la recherche du bien-être. Or, du point de vue du bien-être, on peut dire que la philosophie constitue un empêchement puisqu’elle tend à privilégier la qualité de la pensée dans son exercice d'interrogation et son effort de compréhension par rapport à un enrichissement quantitatif du savoir. A l'intelligence désincarnée et manipulatrice du scientifique spécialisé, objectif, détaché de sa propre humanité, la philosophie oppose, en effet, la pensée réfléchie de l'homme profondément engagé dans le milieu humain où il est appelé à vivre et jouer son rôle et qui, de fait, s'interroge sur lui-même, sur le monde et sur les problèmes posés par sa situation dans ce monde. Philosopher, c'est s'orienter dans la pensée c'est-à-dire se mettre soi-même en question. Mais c'est aussi privilégier un mode de penser et poser un certain type de question. La philosophie, en effet, ne consiste pas seulement à penser par concepts (la science se fonde précisément sur cette capacité), mais à percevoir la signification générale de l'expérience concrète ; elle est l'affirmation de la capacité humaine de passer du singulier à l'universel. Or, dans cet effort vers l'universalité, l'homme-philosophe se retrouve. Son élévation vers les hauteurs de la pensée abstraite et générale est la condition d'une compréhension plus juste de son existence concrète et singulière : s’interroger sur les valeurs et les fins qui permettent de définir l’humain, c’est d’abord, pour l’homme-philosophe, ressaisir sa propre vérité intérieure. S'oublier dans la saisie intellectuelle d'une vérité universelle qui s'impose par son évidence, c'est se séparer de soi, c'est-à-dire aliéner sa subjectivité unilatérale, pour mieux se retrouver soi-même comme subjectivité devenue, comme expression vivante de cet universel-singulier qu'est la pensée consciente d'elle-même comme pensée (on voit par-là que la science, en tant précisément qu’elle se veut une activité consciente de ses objectifs et de ses résultats, ne contredit pas cette logique de la conscience de soi : dans chacune des découvertes spécialisées se trouve la possibilité pour le sujet de se découvrir lui-même comme source universelle de vérité, comme pouvoir de connaître s'actualisant dans l'histoire selon les modalités du temps).
 
En tant que réflexion sur la condition humaine, la philosophie est donc une activité totalement désintéressée qui trouve sa signification beaucoup plus dans les questions que le philosophe est amené à poser que dans ses réponses éventuelles. Son rejet par les hommes provient alors de la nécessité de pratiquer un doute universel et méthodique c'est-à-dire de rejeter les croyances toutes faites, d'élucider les multiples illusions qui transforment notre pouvoir d'agir (notre libre-arbitre) en aveuglement et impuissance. Car, en général, les individus veulent croire sans douter.
 
Fondamentalement, la philosophie est une activité de réflexion. Or, ce terme de " réflexion " implique en philosophie l’idée d’une direction nouvelle de la conscience : au lieu de se diriger vers les choses, les notions, les événements pour les connaître ou les comprendre, au lieu de sortir d’elle-même, d’investir le monde pour s’en rendre maîtresse par la pensée technicienne et le transformer par l’action, la conscience philosophique fait retour sur elle-même. Plutôt que d’utiliser les pouvoirs de la raison à des fins extérieures, l’homme qui passe à la philosophie comprend qu’il lui faut cette fois examiner la raison elle-même afin de connaître ses pouvoirs mais aussi ses limites. Cette attitude sera celle de Kant, par exemple, dans la Critique de la Raison Pure : la raison devra être " juge d’elle-même ". Ainsi, en tant qu’entreprise critique, la philosophie doit interroger, à l’intérieur de notre langage, la tendance irréductible de notre raison à présupposer un " être " des choses qui serait " plus vrai " que leur apparence, plus haut que ce que nous en percevons. Autrement dit, la philosophie devra prendre position contre sa propre prétention à s’élever vers un " au-delà " métaphysique, à sortir du cadre de l’expérience pour connaître l’absolu, l’inconditionné.
 
Sur ce point, l’attitude de Kant est exemplaire : philosopher ne consiste pas à apprendre des doctrines, à trouver des réponses toutes faites et rassurantes aux angoisses que génèrent nos conditions d’existences ; philosopher, ce n’est pas fuir dans un " au-delà mystique ", retrouver un " objet " qui, parce qu’il a la perfection du divin, ne pourra jamais nous décevoir, mais c’est avoir le courage de " penser par soi-même " c’est-à-dire faire face à son ignorance. La philosophie, en ce sens, est d’abord un parcours individuel qui rend nécessaire la pratique des grandes philosophies du passé mais seulement parce que celles-ci permettent de thématiser, sous la forme de questions " officielles ", les inévitables inquiétudes métaphysiques de l’homme et ainsi de renvoyer chacun à son propre questionnement intérieur.
 
Si les questions, en philosophie, comptent plus que les réponses elles concernent avant tout le statut des évidences, aussi bien sur le plan de la connaissance que sur celui de la morale. Il s’agit de déterminer avec certitude la vérité ou la fausseté de nos savoirs ainsi que le bien ou le mal de nos actions. Le doute apparaît justement lorsque l’esprit ne peut pas ou hésite à se prononcer sur la valeur de ces réalités. Cependant, le doute ne procède pas toujours d’une réflexion proprement philosophique, c’est-à-dire d’une volonté ferme et constante de fonder nos connaissances et nos pratiques sur des principes rationnels valables universellement. C’est le cas du doute spontané tel qu’il apparaît au début du §.1 dans les Méditations Métaphysiques. Descartes, en effet, commence par " s’apercevoir " que, parmi toutes ses connaissances, certaines se sont déjà révélées fausses, rendant suspectes toutes les autres. Son doute apparaît alors comme un doute naturel, surgissant à l’occasion d’un problème localisé et limité : Descartes découvre ses erreurs par hasard, de façon accidentelle. Le doute ici est une réaction de défense spontanée de l’esprit devant une incohérence ou une contradiction qui soudain se fait jour. Mais il s’agit alors d’un doute soumis aux passions, dépendant des circonstances, bref exprimant un sentiment de trouble et non une volonté déterminée, une décision libre.
 
La faiblesse du doute spontané apparaît surtout lorsque l’urgence de l’action amène, pour la conduite de la vie, à sacrifier la vérité à la vraisemblance. En effet, la morale par provision, présentée par Descartes dans la 3e partie du Discours de la Méthode, précise que l’occasion n’attend pas et que le temps est toujours mesuré à l’homme d’action. Il faut donc écourter la délibération et agir sans attendre la certitude absolue. Descartes substitue, pour la conduite de la vie ordinaire, à l’évidence du bien, la représentation probable du meilleur. Autrement dit, le doute spontané doit toujours s’arrêter devant :
 
- le principe général et qui n’est pas susceptible de progrès que, mieux vaut suivre le parti le plus vraisemblable, que d’atermoyer (cf. seconde maxime).
 
- une vérité plus particulière et que le temps peut corriger, à savoir que le choix doit se faire selon la probabilité que tel parti est, en conscience, le meilleur (cf. première maxime). Cette règle se retrouve d’ailleurs dans la troisième maxime qui met fin au doute en :
 
- subordonnant le mouvement spontané du désir à une double limite interne, du possible (il suffit de se représenter un bien comme impossible pour ne plus avoir sujet de le désirer), et du souhaitable (« puisque la volonté ne se porte à suivre ou à fuir une chose que selon que l’entendement la lui représente bonne ou mauvaise », elle ne peut donc désirer le mal que si l’entendement y aperçoit quelque apparence de bien : il est impossible de vouloir le mal en tant que tel et sans raison).
 
Si le doute spontané ne permet pas de fonder nos savoirs et nos pratiques, en revanche il est possible d’en tirer une règle pour le jugement : l’expérience de l’erreur révèle une faiblesse dans la nature humaine dont il faut alors se prémunir en adoptant une attitude de méfiance systématique à l’égard de toutes les vérités qui veulent s’imposer à l’esprit par l’autorité. Mais ce doute " méthodique " n’est guère différent du doute sceptique et semble rendre définitivement impossible le projet philosophique défini par Descartes " d’établir quelque chose de ferme et de constant dans les sciences " (cf. Méditation première, §.1).
 
Pour mener à bien la réflexion philosophique et s’élever jusqu’aux principes, il faut donc sortir de l’enfermement du doute sceptique et faire du doute une entreprise volontaire dont la finalité est, justement, de sortir du doute (douter " une fois en sa vie ", une fois pour toutes).
 
Le doute cartésien est donc une décision forcée et, comme tel, ne relève pas de mobiles pathologiques. Il est une démarche entièrement rationnelle qui tente d’échapper au doute en soulevant toutes les raisons possibles et imaginables de douter, y compris les plus folles, les moins raisonnables en apparence (cf. l’argument de la folie : Méditation première, §.4, l’argument du rêve : idem, §.5, l’argument du Dieu trompeur : idem, §.9, etc...). Descartes va développer un doute méthodique qui sort totalement du cadre étroit de la vraisemblance qu’imposent les conditions extérieures de l’existence : Il s’agit de douter de tout et pour cela ce doute doit être à la fois hyperbolique (imposer le passage du douteux, c’est-à-dire du seulement probable, au faux) et radical (douter, non pas de chaque chose, ce qui est impossible, mais des fondements, en trouvant des raisons générales et simples). Radicaliser le questionnement, c’est précisément l’étendre également à tous les domaines possibles. Car l’évidence, qui fonde la vérité, doit reposer sur l’absence de toute raison de douter. Si le doute se limite aux exigences de réussite et d’efficacité dans tel ou tel domaine particulier, il est donc incapable de procurer aux plus évidentes raisons l’occasion d’apparaître : il faut présenter les raisons de douter les plus fortes pour que les évidences fassent la preuve de leur véracité en lui résistant. Mais ainsi, l’esprit peut, au terme de la démarche, accéder à une croyance d’une nature nouvelle, reposant sur la certitude des évidences rationnelles.
 
Ainsi, le détachement est la condition de tout savoir authentique. C'est ce qu'illustre aussi fort bien l'allégorie de la caverne chez Platon. Alors que la méthode dialectique, en particulier dans le dialogue bien conduit, a pour but, non pas d’apprendre un savoir, mais de faire prendre conscience qu’on ne sait pas, provoquant ainsi le désir d’apprendre, l'attitude commune consiste au contraire à adhérer à des représentations sans les questionner. En effet, la réalité première est la réalité concrète de l'homme en situation cherchant, par la conscience, à maîtriser son rapport au monde, à se le représenter afin de donner un sens à son existence. Or, cette quête d’un sens prend d'abord la forme d’une entreprise de justification de ce qui est c'est-à-dire des pesanteurs et des limites qui nous font souffrir. La condition première de l'homme en situation est celle d'une aliénation idéologique : Au lieu d'offrir les moyens d’une réappropriation critique et objective de ce qui nous entoure et nous détermine, nos représentations ne servent qu’à masquer, à cacher le sens véritable de la réalité vécue, à rendre acceptable, admissible, ce qui autrement rendrait l'existence insupportable. En s'opposant à l'illusion d'un pouvoir absolu de la volonté (ce qu'on appelle le libre-arbitre), capable de se déterminer par elle-même indépendamment de toute raison déterminante, en considérant la volonté d’abord comme passion (elle exprime l'extériorité) et non comme action (pure causalité), en privilégiant de ce fait une démarche réflexive dont la fonction est de problématiser les représentations ordinaires, de réélaborer de manière critique les cadres psychologiques et affectifs de notre existence, les valeurs idéologiques transformées en dogmes ou en traditions, la philosophie ne peut donc que s'attirer les foudres de la communauté des hommes qui ne voit en elle, au mieux, qu'une discipline iconoclaste incapable de servir les désirs des hommes.
 
En tant que réflexion, la philosophie au contraire est une source de souffrance ; comme le montre Platon dans le mythe de la caverne, elle puise dans la douleur de l'homme qui a le courage de se détourner de l'obscurité rassurante ou se déroule son existence, pour s'orienter vers la lumière éclatante du soleil de la connaissance, le moteur de la recherche et de l'étude. Contrairement à la science dont la réussite et les succès proviennent de ses résultats positifs, mais dont le bruit triomphant couvre aussi les soupirs et les plaintes du sujet métaphysique et moral, la réflexion philosophique est essentiellement une activité de nettoyage critique de l'esprit dont le sujet ne peut tirer qu’un sentiment de malaise, d’embarras (aporia). Cette étape de " détachement " (lysis), d’affranchissement par rapport au passé, qui cependant nous tourne du côté qu’il faut et nous pousse en avant, exige donc des prédispositions naturelles, pas seulement intellectuelles, mais aussi morales : avoir la force de résister à toutes les séductions, à toutes les fatigues, à toutes les craintes. Telle est l'exemple que nous donne Platon dans le Ménon. Ménon éprouve pour la première fois cette incertitude angoissée devant la conscience de l’opposition entre ce qu'il croyait savoir et ce qu’en réalité il ignore. Son esprit se sent alors paralysé, engourdi, par la perplexité et le doute concernant son illusion de savoir. C’est pourquoi, Ménon ne peut profiter de son propre embarras ; car au lieu de faire face et d'assumer son ignorance, il prétend être libre d’aller où bon lui semble et d’adhérer à des vérités qui lui sont familières plutôt que de rechercher la vérité. De même, dans le Théétète, Platon compare le désarroi de l'esprit, au moment où il s'aperçoit que quelque chose germe en lui, aux douleurs de l'enfantement. L'homme lâche ou intéressé, l'homme dont les qualités naturelles ont été corrompues par les conditions extérieures, principalement sociales, a donc de " bonnes raisons " de ne pas pratiquer la réflexion philosophique.
 
Mais le nom de Socrate nous invite à reconnaître, non seulement le risque pour le confort intellectuel, mais aussi le danger mortel de la philosophie, insupportable au non philosophe qui veut détruire le philosophe. Premier d’un long martyrologe, Socrate ne risque-t-il pas de nous engager dans la voie d’une intégration dans un ordre constitué en valeur suprême : malheur à celui par qui le scandale arrive. Mieux vaut la tranquillité d’un ordre de compromission théorique que la mise à mort ou la persécution. Ainsi parle la lâcheté mais aussi la considération de l’ordre social qui n’est pas qu’un regard sans honneur, car le désordre fait des victimes sans bénéfice. Ne s’est il pas trouvé des analystes pour considérer que la Révolution Française n’avait rien changé.  Alors, mort... où est ta victoire ?
 
On ne reproche pas seulement à la philosophie ses insuffisances sur le plan pratique mais aussi une radicale inutilité du point de vue théorique. L’histoire de la philosophie semble offrir le spectacle d’un cimetière de doctrines qui se succèdent et se détruisent sans apporter de réponse définitive aux questions qu'elles soulèvent. Pire ! Dire de la philosophie, comme nous l'avons fait, quelle est une perpétuelle remise en question et que les problèmes quelle soulève sont plus importants que les réponses qu’elle propose risque de faire effectivement considérer l'histoire de la philosophie sinon comme un cimetière du moins comme un musée. A cause de sa multiplicité ou de sa nature réflexive, la philosophie passe pour une discipline seulement capable de s'intéresser à des problèmes insolubles, contrairement à la science qui progresse en apportant des réponses efficaces. Du point de vue théorique elle apparaît donc totalement inutile. N’est-elle pas semblable au vain travail de Sisyphe condamné par les dieux à hisser sur une montagne un rocher qui lui échappait sans cesse ? C'est une mince consolation de dire, comme Roger Caillois : " Il n’y a pas de travail inutile : Sisyphe se faisait les muscles. " L'homme préfère toujours exercer son corps et son esprit sur des travaux dont le sens lui est clair. S'il n'y a pas de progrès philosophique, à quoi bon philosopher ? Et s'il y a un progrès philosophique, en quoi consiste-t-il ?
 
Si l'on affirme maintenant que la philosophie consiste en une réflexion personnelle, laquelle exigerait un engagement dont le sens ne saurait être remis en question par le progrès scientifique, un nouvel argument surgit alors pour reprocher à la réflexion sa subjectivité. A l'objectivité de la science qui établit des relations s'imposant nécessairement à l'esprit de tous, on oppose la subjectivité des systèmes philosophiques, en tant que constructions arbitraires reflétant simplement l’opinion personnelle d’un auteur. Cette subjectivité de la philosophie explique le dédain pour l'enseignement rigoureux et approfondi qu'elle propose, puisqu'on peut alors considérer que toutes les questions philosophiques ne possèdent que des réponses individuelles, personnelles et privées.
 
Cependant, aucun de ces arguments ne sauraient venir à bout d’une activité qui trouve toujours en elle-même sa raison d’être et sa justification.
 
En effet, l'argument de constatation selon lequel la majorité des hommes ne pratique pas la philosophie parce que celle-ci serait inutile, est d’une valeur bien médiocre. Le consensus ne peut servir d’argument valable contre la philosophie car les erreurs sont aussi collectives. Se sont même celles qui sont le plus difficile à déraciner précisément parce qu’elles sont pour l'individu le moyen de s'intégrer dans le milieu social, de se retrouver en situation. Si le rejet de la philosophie émane d'un jugement collectif, souvent pour des raisons politiques, la conscience individuelle, prédisposée comme nous l'avons vu à fuir la tâche courageuse de réfléchir le monde, ne peut que s'y complaire. L'hostilité à l'égard de la philosophie n'a rien de théorique et d'idéaliste : elle ne répond pas, comme dans la critique marxiste, à la dénonciation des idéologies, ni comme chez Nietzsche, à une généalogie des principes moraux, mais à une volonté de maîtriser les libertés individuelles, de dominer le social dans ses effets, pervers pour la finalité et l'ambition des pouvoirs, d'élévation vers des idéaux d’égalité et de justice. Par ailleurs, la philosophie n’est pas la seule discipline à être rejetée par la majorité des hommes. Le nombre ici ne fait rien à l'affaire. La grande masse des hommes ne s'intéresse pas plus à la philosophie qu'à la science ou à la littérature. Cela prouve uniquement qu’un grand effort d'éducation reste à accomplir. La philosophie est sans doute d'un abord difficile, mais la majorité des hommes n'est nullement indifférente aux thèmes de la réflexion qu'elle propose. Tout homme au contraire est intéressé, concerné, par les questions qu'elle soulève puisque celles-ci convergent toutes vers l'homme lui-même et les grands problèmes humains. On retrouve ici les trois grandes questions dont Kant disait qu'elles représentaient l'ensemble du programme de la  philosophie : " Que pouvons nous connaître ? Que devons nous faire ? Que pouvons nous espérer ? " Ces questions répondent aux préoccupations de tout homme, philosophe ou non. Elles n'émanent pas d'un besoin du coeur (la philosophie serait fille du sentiment), puisque dans ce cas l'échec historique de la Métaphysique comme science, les aurait depuis longtemps fait disparaître. Ces questions émanent d'un besoin de la raison humaine. Elles ne relèvent pas du contenu spécifique des grands systèmes philosophiques, mais d’un besoin irréductible de la raison dont nous pouvons voir les effets dans les questions parfois surprenantes des enfants, au moment ou leur quête d'absolu commence à s'éveiller et avant que des préoccupations plus ordinaires ne s'imposent et les fassent disparaître. L'origine de l'homme, son destin, le pourquoi de son existence, le problème du mal, la coexistence de l'ordre et du désordre, la raison d'être de l'ordre du monde (pourquoi y a-t-il des lois scientifiques et pourquoi sont-elles ce quelles sont et non pas autres ?), le sens même de mon être et de l'être en général (pour-quoi suis-je ? pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ?), telles sont les grandes questions qui définissent les inévitables inquiétudes que l'homme cultive sous le nom de philosophie. La philosophie, de ce point de vue, est donc nécessaire puisqu'elle permet, en thématisant ces questions, de renvoyer tout homme à son propre questionnement intérieur. De manière plus terre-à-terre, il apparaît également que les hommes ont des raisons vitales de s'intéresser à la politique. Or, toute éducation politique s'appuie sur une philosophie plus ou moins explicite (par exemple la politique marxiste s'appuie sur le matérialisme dialectique). Aujourd'hui et plus que jamais, la philosophie est un besoin dont nous constatons l'existence. Ce besoin dépasse l'étonnement ou le séculaire désir de connaître que maintes disciplines peuvent satisfaire. Au contraire, il est en grande partie issu des questions auxquelles ces disciplines ne peuvent répondre. Le besoin philosophique se manifeste " en laissant libre cours aux interrogations que l'homme porte en lui et que l'envoûtement par les techniques et la crainte de nouvelles mystifications idéologiques l'empêchent d'exprimer ". Ainsi la philosophie est plus que jamais nécessaire puisqu’elle exprime " ce besoin irrépressible que la technicisation de l'existence a purifié et exaspéré au lieu d'abolir " (cf. Fougeyrollas, La philosophie en question).
 
Certes, l’exercice philosophie, surtout sous sa forme systématique, demeure pour beaucoup impraticable, inaccessible. Mais cette difficulté existe surtout parce que la réflexion exige une activité de l'esprit qui s'oppose à l'acceptation passive des évidences. De ce point de vue, la philosophie répond à l'accusation d’être une forme de culture purement historique c'est-à-dire sans cesse dépassée par l’évolution de la réalité. En effet, dire de la philosophie qu’elle est inutile parce que son histoire est comparable à un musée présentant des doctrines périmées, c'est oublier que la philosophie est d'abord un parcours. Cela signifie que chacun doit tenter de résoudre pour lui-même les grandes questions qui intéressent le destin de l'homme en général. Mais une telle démarche n'est possible que si l'on prend la peine d'étudier les concepts dont chacune des grandes philosophies du passé est porteuse, afin de pouvoir confronter l’expérience singulière que l’on vit dans l'immédiateté et la relativité unilatérale du moment, à l'expérience fondamentale des essences, de ce qui échappe aux fluctuations de la subjectivité, à la succession anarchique des contraires. Car la philosophie (présente dans toutes les philosophies du passé) a pour fonction de déterminer les principes, de connaissance et d’action, voire de religiosité, comme ajoute Kant. Sans principe, je ne peux agir. Ce n’est que si la philosophie détermine la ligne générale de mon action que je puis avoir une pratique. Les grands engagements de la vie ne peuvent se concevoir sans pensée, faute de virer à l’empirisme dans ce qu’il a de plus aléatoire, ou au fidéisme dans ce qu’il a de plus aliénant. Si je choisis un métier, un conjoint, un engagement, sans philosophie, je me découvrirai un jour victime de l’imaginaire qui avait présidé à mon choix. En ce sens, la morale par provision ne peut rivaliser avec une véritable éthique.
 
Il ne s'agit pas d'adopter telle ou telle grande philosophie mais, en s'aidant des philosophies existantes, de s'entraîner à construire sa propre philosophie. Apprendre à philosopher c'est adopter pour devise cette phrase de Kant : " jusqu'ici, il n’y a pas de philosophie qu'on puisse apprendre, car où est-elle ? Qui l'a en sa possession, et à quels caractères la reconnaître ? On ne peut qu'apprendre à philosopher ". Apprendre à philosopher, c'est ne pas refuser d’examiner un problème sous prétexte qu'il est insoluble tant qu’on n’a pas déterminé par soi-même ce qu'il est convenu d'appeler la solution d'un problème. En ce sens, le service suprême de la philosophie, c'est de faire du philosophe un homme qui n’a pas peur de penser, c’est-à-dire de conquérir sa liberté. Ainsi, si on ne peut parler d'un progrès philosophique au sens ou l'on parle du progrès des sciences (accumulation des connaissances, création de nouvelles lois, précision des mesures, etc...), le progrès philosophique existe néanmoins. Il consiste dans le renouvellement, dans la réactualisation des grandes questions philosophiques, sous l'effet d’une pensée qui se cherche elle-même, qui commence absolument à chaque fois qu'elle recommence l'étude d'une philosophie. On ne peut donc nier qu’il y ait des réponses, historiquement et philosophiquement déterminées. Mais ces réponses ne sont jamais données comme un savoir que l’on puisse apprendre, mais au contraire comme une occasion de questionner et de discuter c’est-à-dire comme le point de départ d’une pensée personnelle. Les questions manifestent finalement le caractère proprement philosophique de l’histoire de la philosophie, contre le point de vue simplement historique. La philosophie, en effet, n'a pas d’histoire parce que, comme le précise très justement Hegel, l'histoire des idées philosophiques n’est pas une véritable histoire. Certes, la critique des apparences trompeuses dans le mythe de la caverne chez Platon, le cogito chez Descartes, la problématisation de la raison et de l'expérience chez Kant, appartiennent à des moments distincts du développement historique et, comme tels, ne nous concernent pas directement. Mais, au-delà de l'aspect proprement historique, voire idéologique ou contingent, par lequel chaque philosophie est l’expression spontanée de la conscience de son temps, demeure l'aspect proprement philosophique et substantiel, celui par lequel chacune d'elle contient des principes qui n'ont rien d’éphémères puisqu’elles sont des acquisitions de la pensée et font donc partie intégrante de son exercice actuel. Ainsi, non seulement la diversité des philosophies n’est pas un argument contre la philosophie mais, de plus, c'est dans l'histoire de la philosophie que l'esprit philosophique peut se développer puisque dans cette histoire se sont ses propres déterminations logiques que l’esprit retrouve. L'histoire est donc une histoire vivante qui ne se vit jamais au passé mais au présent. La nécessité de la philosophie vient de là : dans l'histoire de la philosophie le sujet singulier se découvre comme raison incarnée selon les multiples et diverses modalités du temps. La philosophie est éternellement jeune puisqu’elle n’est rien d’autre que la manière qu’a le passé de vivre dans le présent, de participer activement à la juste compréhension de ce présent et au mûrissement de l'avenir.
 
Du coup, la philosophie répond à l'argument qui opposait l’objectivité  de la science imposant à l'esprit de tous ses relations nécessaires, à la subjectivité de la pensée philosophique reflétant seulement l'opinion personnelle de son auteur. Dans la mesure où le problème de l'objectivité est lié à celui de l'universalité, la question a été précédemment examinée. La philosophie, en effet, est avant tout une oeuvre de la raison et non l'expression d’un tempérament.
 
Si donc la vérité philosophique n’est pas subjective, il est vrai quelle est et qu’elle ne peut pas ne pas être l'expression d'une personnalité. L'universalité du discours philosophique ne contredit nullement la singularité de l'expérience dans laquelle elle s'enracine. La référence à l'histoire de la philosophie nous l'a bien montré. Si la philosophie est inséparable de la personne qui la pratique c'est parce qu'elle n'est pas la méditation abstraite d’un esprit désintéressé, désincarné, indifférent au monde, mais la réflexion d’un homme sur le sens ultime des expériences dans lesquelles il se trouve lui-même profondément engagé.
 
Ainsi, de nombreux points de positivité éclatent...  et plaident en faveur de la reconnaissance de l’utilité de la philosophie. Mais cette positivité s’inscrit sous la présupposition que la philosophie appartient à l’ordre des moyens. Or, rien n’est moins sûr et il faut statuer sur l’opposition entre fin et moyen. Qu’en est il ?
 
Un moyen est un intermédiaire par lequel on doit passer ou par lequel on peut passer. Si je veux soulever une lourde roche, il me faut un levier : moyen nécessaire. Si je veux me déplacer, je recours à ma voiture : moyen facultatif destiné à me faire gagner du temps, ce qui est souvent intéressant. Les moyens entrent comme outils dans la catégorie générale de la médiation...
 
...or, c’est la définition même de la bêtise que de confondre moyen et fin. Le moyen devient une fin, mais la fin n’est jamais un moyen. La fin n’est jamais en tant que telle relative à une autre fin qu’elle même et c’est bien ce qui l’amène à ne pouvoir supporter la question du pourquoi. Le débutant se laisse piéger par des questions du type " pourquoi vivre ? ", ou " pourquoi être heureux ? ", mais c’est le propre de la fin suprême de ne pouvoir se penser en vue d’une autre fin qu’elle même, ce qu’indique la notion de fin en soi.
 
Il est vrai que les moyens m’apparaissent parfois comme des fins. Ce qui fait que j’ai le plus grand mal à distinguer les fins dernières et les fins relatives à une autre fin implicite. Cela conduit à une définition de l’homme sans philosophie : il ne parvient pas à la clarté téléologique. Le spectacle d’un collectionneur de futilités ou d’un amoureux de sa voiture qui la pare de tous les colifichets possibles confirme ce propos.
 
La philosophie ne saurait être considérée comme un moyen. Elle nomme notre essence intime d’êtres pensants, dont la pensée reconnaît qu’elle est à distance d’elle même. L’homme a la pensée comme destination, comme " entéléchie " selon le vocabulaire d’Aristote. En ce sens, toute philosophie ne serait rien d'autre qu'une anthropologie critique. Dissiper l'illusion d'une objectivité constitutive telle est sa finalité propre. En effet, la subjectivité s'explique, non à partir d'elle-même - le penser -, mais du facticiel - la société, cette dernière correspondant tout autant à un ensemble de sujets individuels qu'à leur négation comme individualités. A l'opposé, l'objectivité de la connaissance ne peut quant à elle être envisagée sans penser, c'est-à-dire sans subjectivité. On peut encore affirmer que toute réalité est toujours appréhendée dans une perspective humaine, soit l'impossibilité d'accéder à une connaissance objective des faits, la subjectivité étant toujours socialement préformée. Rien ne se donne à saisir de manière immédiate, tout est construit : l'interprétation, laquelle en est indissociable, oriente la saisie du fait ; les éléments du réel ne devenant effectivement compréhensibles qu'à partir du moment où on les isole par la pensée en tant que moments singuliers, où on les singularise du tout, ce qui ne peut être le fait que d'un sujet, individuel ou collectif. Dans ces conditions, l'objet propre de la philosophie comme fin en soi, ne peut être que la critique des prétendus savoirs, des systèmes de pensée et de l'esprit de système, des attitudes collectivement partagées, dont la naturalité, l'immédiateté ou l'objectivité se trouveraient ordinairement affirmée alors même qu'ils seraient dans la continuité d'une idéologie, ou historiquement et socialement constitués. Elle exprime cette tension irréductible entre le désir pour la vérité - l'étymologie en fait de manière significative une théorie érotique - et l'attitude fondamentalement subversive de toute vérité possible ouvrant l'espace propre de la réflexion critique. La philosophie n'a pas d'utilité - à proprement parler, elle ne sert à rien -, ne saurait en avoir une. Mais elle reste indispensable en tant que critique, force de résistance de la pensée contre la simple volonté de puissance pour toujours rester maîtresse d'elle-même, permettant de dénoncer toute forme d'adhésion irréfléchie ou d'acquiescement aveugle à quelque autorité que ce soit : de la nature, de l'évidence première, de la bienséance, de la morale, de la compétence, etc..., ou du discours, celui du Maître. Négation ou résistance du penser contre ce qui est imposé ou " s'impose ", c'est-à-dire irait de soi. En ce sens, et dans nos sociétés, elle n'apparaît, ni plus ni moins, que comme le dernier refuge de la liberté de l'individu. Elle ne saurait se renouveler qu'en se confrontant constamment à son objet, lui-même en mouvement, ouvertement et de manière cohérente, sans se laisser prescrire les règles d'un savoir organisé, perçant tout ce que la société a recouvert sur cet objet, forgeant pour ce faire ses concepts, sur le fondement d'une expérience toujours singulière. Le fanatisme réducteur, celui de la science, de la logique à tout prix, de la simplicité, de l'élémentaire, ne lui appartient pas. La référence à la science, à ses règles, à la validité exclusive des méthodes qu'elle a développées, réprime la pensée libre, c'est-à-dire non conditionnée. La liberté du penser signifie aussi la possibilité d'expression de sa non liberté, là où émerge davantage que l'expression : une vue-du-monde préformée et imposée. En ce sens, celui qui tourne le dos à la philosophie tourne le dos à son identité. Il se fuit. Loin de se divertir, il se nie, et cette négation de sa propre humanité se nomme barbarie. C’est pourquoi, la philosophie ne peut penser contre elle ! Dès qu’elle se considère, elle aperçoit la nécessité de sa diffusion : enseignement, certes, mais aussi nécessité de l’instauration d’un climat qui l’entretienne et le vivifie. Nous en sommes loin, mais ce ne peut constituer un argument.


Tu peux m'expliquer la ligne 6 ? :D

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 11:26:43    

Bon, avant de partir... Le mot philosophie est attribué selon la tradition au mathématicien grec Pythagore : à des amis qui lui demandaient s'il se considérait comme un savant (Sophos) il répondit qu'il se considérait plus modestement comme un philosophos, c'est-à-dire comme un ami (philos) de la sagesse (sophia). Sauf que le mot sophia possède quatre sens principaux que l'on retrouve plus ou moins dans la manière de considérer aujourd'hui la philosophie :
1) l'habileté manuelle de l'artisan ou de l'artiste.
2) La science (universelle, théorique et désintéressée) ou philosophie.
3) La sagesse pratique.
4) en un sens péjoratif, la ruse.

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 11:30:01    

Autant j'ai toujours été très bon en philo, autant j'ai toujours trouvé que c'était de la branlette intellectuelle sans interêt et une perte de temps considérable.

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 11:44:12    

ze_geek a écrit :

Je sais c'est bizare comme question, mais c'est une vraie question qu'on m'a posée et j'ai pas été très convainquant. Qui pourrait vraiment me répondre?? plz :hello:


a peu de chose pres le titre du topic résume tout...

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 12:02:03    

Pour moi, ce qui ressort de cette démonstration c'est que la philo n'est qu'une activité dont les admirateurs cherchent à s'épater mutuellement de leur prouesse de manipulation de concepts et du langage. Plutôt que de chercher à réfléchir "proprement" et de faire ressortir des idées claires et accessibles au plus grand nombre, le philosophe va chercher à compliquer à l'infini sa réflexion dans une diarhée verbale, qui n'a que pour principale intérêt que de flatter son égo et d'épater la galerie.
C'est comme pour aller d'un point A à un point B avec un petit avion: certains pourront le faire dans une débauche d'accrobaties plus folles les unes que les autres. Mais à part se faire plaisir, épater ses paires et leur donner des idées pour essayer de faire plus compliquer, la majorité va trouver ça impressionnant, n'aura pas la moindre idée de comment ça pu être fait, mais va trouver ça un peu abérant, une trajectoire bcp plus fluide donnant le même résultat.
 
En gros, la philo c'est bien pour ceux qui aiment se torturer l'esprit d'une certaine manière, mais ça n'est en aucun cas indispensable à la bonne marche du monde. J'aime bien les échecs, le niveau de complexité peut être dément mais en aucun cas je  ne me permetterais de dire que le monde doit beaucoup à ce jeux de l'esprit.

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 12:13:22    

andhar a écrit :

Pour moi, ce qui ressort de cette démonstration c'est que la philo n'est qu'une activité dont les admirateurs cherchent à s'épater mutuellement de leur prouesse de manipulation de concepts et du langage. Plutôt que de chercher à réfléchir "proprement" et de faire ressortir des idées claires et accessibles au plus grand nombre, le philosophe va chercher à compliquer à l'infini sa réflexion dans une diarhée verbale, qui n'a que pour principale intérêt que de flatter son égo et d'épater la galerie.
C'est comme pour aller d'un point A à un point B avec un petit avion: certains pourront le faire dans une débauche d'accrobaties plus folles les unes que les autres. Mais à part se faire plaisir, épater ses paires et leur donner des idées pour essayer de faire plus compliquer, la majorité va trouver ça impressionnant, n'aura pas la moindre idée de comment ça pu être fait, mais va trouver ça un peu abérant, une trajectoire bcp plus fluide donnant le même résultat.
 
En gros, la philo c'est bien pour ceux qui aiment se torturer l'esprit d'une certaine manière, mais ça n'est en aucun cas indispensable à la bonne marche du monde. J'aime bien les échecs, le niveau de complexité peut être dément mais en aucun cas je  ne me permetterais de dire que le monde doit beaucoup à ce jeux de l'esprit.


on frise qd meme l'obscurantisme dans ce que tu dis (meme si je suis d'accord pour le cote difficulte de langage inutiles, les idees les plus profondes peuvent passer avec des mots simples, mais la phase de reflexion et d'avancee de la pense est forcement delicate d'acces et de comprehension.)

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 12:15:19    

andhar a écrit :

Pour moi, ce qui ressort de cette démonstration c'est que la philo n'est qu'une activité dont les admirateurs cherchent à s'épater mutuellement de leur prouesse de manipulation de concepts et du langage. Plutôt que de chercher à réfléchir "proprement" et de faire ressortir des idées claires et accessibles au plus grand nombre, le philosophe va chercher à compliquer à l'infini sa réflexion dans une diarhée verbale, qui n'a que pour principale intérêt que de flatter son égo et d'épater la galerie.
C'est comme pour aller d'un point A à un point B avec un petit avion: certains pourront le faire dans une débauche d'accrobaties plus folles les unes que les autres. Mais à part se faire plaisir, épater ses paires et leur donner des idées pour essayer de faire plus compliquer, la majorité va trouver ça impressionnant, n'aura pas la moindre idée de comment ça pu être fait, mais va trouver ça un peu abérant, une trajectoire bcp plus fluide donnant le même résultat.
 
En gros, la philo c'est bien pour ceux qui aiment se torturer l'esprit d'une certaine manière, mais ça n'est en aucun cas indispensable à la bonne marche du monde. J'aime bien les échecs, le niveau de complexité peut être dément mais en aucun cas je  ne me permetterais de dire que le monde doit beaucoup à ce jeux de l'esprit.

je pense que tu ne sais pas que ce que c'est que la philo :/


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Acceuil /Que se passe-t-il quand un gouvernement décide que le travail est un devoir ?
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Marsh Posté le 10-06-2005 à 12:25:46    

En fait, la question est très mal posée. "a quoi sert la philo?" Sûrement pas à faire augmenter le PIB mondial. On est d'accord.
Et c'est tant mieux !
C'est comment si on se demandait "a quoi sert la musique ?"...
 
J'aime assez l'approche de Deleuze sur ce qu'est la philo : c'est l'art d'inventer des concepts.
C'est pas forcément une discipline qui prétend expliquer le monde dans son ensemble. C'est, à la base : poser des questions, des problématiques.
A vivre, mieux, quoi.
 
Après on peut vivre sans. "mais moins bien".

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Marsh Posté le 10-06-2005 à 12:28:45    

Le3d a écrit :

+1
 
Si tu ne resors pas les mêmes idées que les philosophes reconnues, ta copie ne vaut rien. [:airforceone]  
Bref, on ne réfléchie pas, on apprend par coeur et on recrache tout.
 
[troll on]
Tfaçon, Platon était un vieux blaireau et Socrate un gros chieur
[troll off]


 
donc tu n'aimes pas la manière dont on l'enseigne, mais pas forcément la matière en elle-même. De toute façon je suis d'accord avec toi sur le fond, au bac pour décrocher la jackpot il faut avoir appris ses notions par coeur et les recracher au mieux.

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Marsh Posté le    

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